samedi 4 mars 2017

L'argent, voilà l'utopie .....












L’argent, voilà l’utopie.




Qu’y a-t-il de plus concret que l’argent? De plus matériel? Son pouvoir est immense, le sérieux qu’on lui accorde, extrême, son universalité, incontestable, son attractivité, infinie. Rassembler argent et utopie dans le titre d’un texte peut donc sembler paradoxal. Rien ne ressemble moins à une idée que l’argent, à priori.

Si nous imaginons, comme je le lui souhaite, que l’Humanité va continuer de peupler la Terre pour des millions d’années, nul doute que l’évolution l’amènera à remettre en cause, comme nous le faisons, les pratiques des humains antérieurs. Nous. Si, comme il est probable, et même si elle ne l’emporte pas définitivement, la sagesse humaine continue de s’accroître, je pense qu’ils n’auront pas de mots assez durs pour notre civilisation qui aura tué, emprisonné, condamné, exécuté, mutilé, pour de simples bouts de papier imprimés sans absolument aucune valeur, comparés à la vie, cette étincelle mystérieuse dont nous somme dépositaires.



On ne cesse de nous rebattre les oreilles avec le fait que nous ne penserions qu’en termes utopiques, à quoi les dirigeants politiques opposent de plus en plus souvent, de plus en plus systématiquement, celui de pragmatisme. Le socialisme, la paix, la liberté, l’égalité, seraient des utopies réservées à je ne sais quelle bande de doux rêveurs qui ne voudraient pas voir que la vie, la vie réelle, le monde des “vrais gens”, ne sont pas régis, ne peuvent l’être, par ces idéaux d’un autre âge, vains, négligeables pour qui aurait les pieds sur terre. Mais qu’est-ce, au juste, qu’une utopie? Si l’on consulte le dictionnaire, il nous dit: conception ou projet qui paraît irréalisable. Si l’on s’en tient à une définition plus “épidermique”, une utopie, ce serait une bonne idée qui n’a aucune chance de se concrétiser. Une “bonne idée” restant un terme à définir. Dirions-nous, plus précisément, une idée généreuse? Une utopie peut-elle être négative? Dans ses intentions, veux-je dire. Par exemple, l’espoir d’éliminer tous les cons est-il une utopie? Non, au sens où elle suppose élimination. Oui, au sens où elle propose cet acte expéditif aux fins d’améliorer le cours des choses. La pais est une utopie. La guerre peut-elle en être une? La liberté est une utopie. L'enfermement, la contrainte, la prison, assurément, non. Je pense donc pouvoir tabler sur ce point qu’une utopie est, par essence, une chose positive. Une bonne mauvaise idée. Bonne parce que généreuse, tournée vers l’avenir radieux, mauvaise parc qu’irréaliste.

On en arrive ainsi à une définition plus moderne de l’utopie. Pour nous, hommes du vingt et unième siècle, c’est une bonne idée qui, lorsqu’on tente de la concrétiser, se révèle toujours catastrophique. L’exemple le plus patent étant le marxisme. Du moins, pour ceux qui nous gouvernent.

En quoi l’argent pourrait-il, alors, être une utopie? Reprenons aux origines: qu’est-ce que l’argent?




I) Qu’est-ce que l’argent?


Reportons-nous loin en arrière, au temps des premiers Hommes, pas forcément les tout premiers, quoique. Imaginons que vous êtes l’un d’eux, que vous avez deux cochons et le groupe humain voisin, des fruits, par simple hasard de répartition des territoires. Votre tribu va à la rencontre de la voisine et propose d’échanger le cochon excédentaire contre une quantité jugée équivalent de fruits. Tope-là, vous avez des fruits, ils ont de la viande. Compliquons le problème: vous avez un cochon surnuméraire. Votre voisin a des fruits qui feraient votre bonheur mais, lui, n’a rien à faire d’un cochon. Ce qu’il veut, c’est des outils. Un autre de vos voisins fabrique des outils mais ne désire ni fruits ni cochon. Ce qu’il veut, c’est du blé. Vous trouvez un voisin plus lointain qui, lui, a du grain et veut bien les échanger contre un cochon. Il vous reste à faire quelques kilomètres. Vous amenez le cochon au dernier, prenez les grains, échangez ce grain contre des outils auprès du deuxième, et allez enfin voir le premier à qui vous remettez des outils contre ses fruits. Avec, en sus, toute la problématique des quantités. Combien de blé pour un cochon, combien de grains pour un outil, combien d’outils pour tant de fruits. Au total, vous risquez de vous retrouver avec des grains et des outils dont vous n’aviez aucun besoin. Et c’est là que s’invente, dans un cerveau assez clairvoyant, le concept d’argent. Si l’on invente une monnaie d’échange par tous reconnue, plus besoin de se déplacer pour quatre transactions. Le dernier vient chercher mon cochon, me le paye et, avec ce qu’il faut de monnaie, j’achète des fruits au premier. Belle idée, généreuse, pratique, facilitatrice. Une utopie. Bien sûr, il reste à inventer le support matériel des échanges, à ancrer cette belle idée dans le réel, en un mot, à trouver la monnaie. La première idée qui a dû venir à notre homme devait être quelque chose comme un caillou rond. Très mauvaise idée. Les cailloux ronds sont légion. Je me baisse, je suis riche. Plus rien n’a de valeur. Il faut trouver un objet rare. La seconde idée a dû être quelque chose comme un os particulier d’un animal comestible. La rotule du mouton, le bréchet d’une volaille. Beaucoup moins répandus. Mais sûrement encore trop. Il n’a pas dû couler beaucoup d’eau sous les ponts avant d’en arriver à une pierre précieuse, puis, tout naturellement, au cuivre, à l’argent et à l’or. Arrivé à ce point, on pourrait penser que l’histoire est terminée. L’argent n’est plus une utopie puisqu’il a trouvé sa traduction dans le réel. C’est évidemment sans compter sur la dérive naturelle de cette fausse bonne idée: l’accumulation.


II) L’accumulation


L’existence de points d’accumulation est concomitante à l’existence même, ils existent partout et en tous temps, à la naissance de l’univers même. La théorie des points d’accumulation dit, pour simplifier, que, si vous lâchez un nombre important de billes sur une table, vous n’avez aucune chance de les voir se répartir uniforméméent sur toute la surface de la dite table mais qu’elles vont se disposer, aléatoirement, certes, mais toujours en formant des “amas”, plus ou moins gros, plus ou moins nombreux. Ce fait est, pour nous, un heureux hasard, puisque, si l’on considère que la théorie du Big Bang est réaliste, plutôt que de se répartir unifomément dans tout l’univers, la matière s’est agglutinée, par endroits, en tas, donnant naissance aux étoiles, aux planètes puis à nous. L’accumulation est aussi âgée, aussi présente, que le premier atome créé. Elle est intimement liée à l’existence. Par voie de conséquence, créer une chose, c’est, inévitablement, en créer l’accumulation. L’eau existe, avec elle les lacs, nous inventons l’automobile, les bouchons le sont aussi. Ainsi en va-t-il de l’argent. Depuis l’invention du concept d’argent, celui-ci s’est accumulé en certains points. Dans des poches, des bourses, des coffres, des banques. Pour autant qu’elle soit inévitable, l’accumulation est-elle une bonne chose? Pour ce qui me concerne, j’aurais mauvaise grâce à me plaindre. Chaque humain n’est autre chose qu’un point d’accumulation de matière. Pour ce qui concerne l’argent, par contre, je serais moins enthousiaste. Il m’apparaît que ce serait plutôt une dérive indésirable et lourde de conséquences néfastes.

Accumuler l’argent n’est pas, vous en conviendrez, conforme à l’idée qui a présidé à son avènement. Tout est question de quantitité, je vous l’accorde. Mettre un peu à gauche pour voir venir n’est pas très préjudiciable, nécessaire, même, pour assurer la continuité de l’existence. Mais accumuler des milliards, je le crains, est non seulement dérogatoire à l’idée de base mais, de plus, une dénaturation de l’argent même, qui devient, par là, valeur lui-même, alors qu’il n’a plus d’équivalent en biens matériels, qu’il ne se mange pas, qu’il est un piètre carburant, bref, qu’il devient virtuel. La logique voudrait que l’accumulation d’argent soit inepte. Que l’argent, à l’exception d’une petite partie, soit toujours en circulation. Et, conséquence, que l’accumulation ne s’opère pas sous la forme de monnaie mais d’un autre bien, qui reste peut-être à inventer, spécifiquement dédié à marquer la richesse. La dérive finit d’acquérir son caractère néfaste avec l’invention du prêt et de l’usure. A ce point, l’accumulation d’argent s’entretient elle-même puisque l’intérêt permet d’en augmenter automatiquement le montant, sans autre action que de le posséder. L’argent devient de plus en plus virtuel. Il y a une énorme différence entre posséder quinze voitures, dix maisons, une île déserte, un avion, vingt châteaux, cent kilogrammes de caviar ou bien posséder l’argent nécessaire à leur acquisition. L’argent ne se mange pas, fait un très médiocre bateau, n’est avion qu’en papier, en un mot, il est virtuel. et sa valeur ne dépend que d’une convention: sa valeur d’échange, reconnue, admise par tous, comme ce fut le cas au commencement même de son existence. L’accumulation d’argent est un non sens, une ineptie, et ce point serait risible s’il n’était la cause d’à peu près tous les problèmes du genre humain. Pourquoi les ravages de la mondialisation, la culture du pavot, les guerres, la course au pétrole, les morts de la faim, le sida en Afrique, les préoccupations sécuritaires, l’autorité de l’Etat, pourquoi leurs terribles conséquences en termes de vies humaines si ce n’est pour l’accumulation d’argent?





III) L’argent, voilà l’utopie!

Il ne vous aura pas échappé que l’accumulation d’argent est synonime de pouvoir, lequel pouvoir n’a pas intérêt à voir chamboulé l’ordre immuable des choses. L’argent doit rester ce qu’il est et où il est. C’est la raison pour laquelle le parti de l’argent dénonce avec tant de force les utopies de gauche, les théories révolutionnaires, s’appuyant pour cela sur les drames humains, les massacres, les bains de sang, hélas réels, qu’ont engendrées toutes les tentatives de les appliquer dans le réel. Les préoccupations pour les droits de l’homme de ces unanimes et pragmatiques contempteurs ne sont pourtant que façade, un biais par lequel ils trouvent matière à condamner rédhibitoirement ce qu’ils nomment utopies, s’évitant ainsi de révéler leurs vraies intentions, accréditant l’idée de l’impossibilité de faire autrement que ce qui est, et préservant leur richesse. Leur estime des autres étant proche du néant, il n’est pas permis de douter qu’il ne faut ici voir qu’une manipulation.

A tous ceux-là, éternels puissants, je voudrais opposer leurs propres arguments: ils condamnent des idées au nom du fait qu’elle furent particulièrement meurtrières. Et l’argent? Qu’est-ce d’autre qu’une idée meurtrière? Et de combien de morts est-il responsable? Une idée, oui, celle d’inventer un medium pratique pour des échanges. Ces gens disent que l’utopie est à proscrire parce que ses conséquences sont toujours catastrophiques. Et l’argent? Les dérives de l’utopie seraient la cause de tous les massacres depuis la Révolution française? Et l’argent? Depuis quand cette idée tue-t-elle?

A tous ceux-là, qui chassent d’un revers de main toute idée susceptible de changer un tant soi peu l’ordre établi au prétexte qu’elles seraient toutes des uopies, j’ai le regret de le dire: leur monde tient sur la pire d’entre toutes. L’argent, voilà l’utopie!

vendredi 3 mars 2017

Surmoi ? Késako ?....

Je pense avoir attrapé récemment ce qu'on nomme le bout de la pelote... Par modestie ( feinte, évidemment...), je préfère dire "un bout de la pelotte" ... et ce bout est un truc absolument évident.. La disparition, dans la pensée actuelle, partout, politique, Art (y compris littérature), philosophie, médecine, instances officielles, partout, de la notion de "surmoi" .... Vous savez, ce machin, au-dessus de vous, qui vous dit que vous agissez correctement ou non ... Le bien , le mal, résument ceux qui n'ont pas lu NIetzsche, ou mal lu, individualisme, je réponds, dans le sens premier de ce terme en épistémologie ... Le miroir du rasage matinal, dans le langage commun. Je vois qui dans ce morceau de verre censé renvoyer mon image... Quelle image de moi me renvoie-t-il ? Oubliez l'idée de dieu. Le ciel est vide, définitivement vide. Revenons à l'individu. Au-dessus du "moi", plus rien ... Plus rien qui m'empêcherait de mentir, de manipuler, de me foutre de la gueule du peuple, plus rien .... Plus rien de l'introspection destructrice des mensonges, plus rien de l'idée de vérité.... Plus de "surmoi" ... Et, paradoxalement, le nom donné à ce phénomène, en novlangue, est justement "individualisme" ... Le cercle bouclé.. On l'a dans le cul .... Pour combien de temps ?

mardi 12 juillet 2016

Le but ou le voyage ?


Cette nuit, deux de mes neurones ( j’en ai plus de deux, donc …) sont entrées en contact, me révélant la solution à un problème intellectuel qui me tracasse depuis des décennies. Vous connaissez les intellos. Ils s’abandonnent plus que de raison à l’onanisme intellectuel, cette activité qui, paraît-il, ne produirait aucun résultat. T’as qu’à croire ! … A peu près tout ce qui nous entoure est le produit d’un instant de plaisir solitaire d’un intellectuel. Ouvre la fenêtre, camarade, et, dans le même temps, tes yeux. Ce qui s’est révélé, cette nuit, vous savez ce qu’on raconte sur le sommeil, est la réponse au délicat problème du voyage ou du chemin. Je vais expliquer, pour les durs de la feuille : depuis quelques décennies circule, dans l’opinion, cette idée que ce qui importe, dans la vie d’un humain, n’est pas le but qu’il cherche à atteindre mais le chemin qui le mène à ce but. Une pensée dite « positive » issue du bouddhisme. Ce qui, pour moi, a toujours eu l’apparence d’un paradoxe puisque, dans la réalité, tout chemin aboutit à un but. Dès lors que ce but est atteint, il m’a toujours paru difficile, voire indécidable, de distinguer entre l’importance du but et celle du chemin. Si le chemin avait atteint un autre but, le voyageur en serait-il vraiment satisfait ? Ce jugement ne peut advenir que depuis la position du but. En 1968, on résumait ça par un slogan : d’où parles-tu, camarade ? … Je vais prendre un exemple concret. Parlons, sous l’angle du but ou du voyage, de deux personnalités : Jean Zay ( 6 août 1904, 20 juin 1944) et de François Mitterrand (26 octobre 1916, 8 janvier 1996). Alors ? Le chemin ou le but ? En quatre mois, Zay a édifié l’éducation nationale de notre époque, le CNRS, le festival de Cannes et j’en passe beaucoup … En quatre vingts ans, Mitterrand a fait quoi ? Il a collaboré, il a été président et il a aboli la peine de mort. Au crédit, donc, la fin du meurtre officiel et c’est à peu près tout. Donc : but ou voyage ? Zay, lui, son voyage a été quasiment rectiligne : juif, de gauche ( en ce temps-là les juifs étaient de gauche …) et, très logiquement, mort au bout des fusils de l’extrême droite. Mitterrand, lui, c’est louvoiement, infidélité, renoncement, dissimulation … Vous préférez quoi ? Mitterrand, hein ?... Ne répondez pas. Dans un pays où, chaque année, le peuple dépense plusieurs millions d’Euros pour gratter des tickets avec lesquels on peut gagner des millions, la réponse est évidente. L’un est mort à quarante ans au nom de ses convictions, l’autre, qui n’en a jamais affiché aucune, a gagné le gros lot : il a été président. Ainsi donc, ainsi donc, il semble que le « but » ne soit pas si dérisoire que ce qu’en pense la majorité. Surprise, non ?... Bah non, eh ! … Qu’il est con … On le sait tous. On fait semblant. On saute de la falaise parce que le Lemming qui nous précède a sauté. Après, on compte sur les scientifique pour expliquer pourquoi c’était notre destin, inévitable, on compte sur dieu, qui nous rattrapera au dernier moment, le hasard, on appelle ça, et, surtout, on pense que c’était pas de notre faute. Parce que, au cas où tu ne le saurais pas, intellectuel de mes deux, on sera encore là après ! … On croit en dieu. C’est d’ailleurs là que se trouve le nœud du problème. La religion. Car, qu’elle soit d’origine bouddhiste, chrétienne, juive, musulmane, ce que vous voudrez, la philosophie positive n’est que la traduction dans la pensée de ce qu’on pourrait nommer fatalité, le fait qu’on ne peut pas grand chose à l’ordre des choses et que, donc, on ne peut que l’accepter. C’est exactement l’endroit où la religion devient politique et se révèle être un instrument au service du pouvoir. Avant tout mater toute révolte. Et Nietzsche, me direz-vous ? Nietzsche et son éternel retour ? Aucun rapport, dis-je. Car, dans le cas de la religion et de la philosophie positive, autre nom de la religion, il existe une différence essentielle. Dans l’un des cas, on accepte une fois que le chemin est parcouru, la religion, dans l’autre, on l’accepte d’emblée, Nietzsche. Dans le premier cas, on valorise le chemin, dans l’autre le but. Pour en revenir à mon exemple concret, je ne doute pas que Mitterrand ait été satisfait de son long chemin semé de roses, dans l’autre, Zay, je pense que le chemin n’est pas source de joie. Ce qui les réunit est simple : Zay a dû se dire que « ça valait le coup », grâce au but atteint, et Mitterrand … aussi. Au bout du compte, seul le but est donc important. Mais, néanmoins, je dois reconnaître un certain embarras. Je n’ai pas cette disposition d’esprit qui permet de trancher sur tous les sujets qui se présentent. Bien qu’ayant vu le fait que ce débat est très politique, que le fait qu’il fasse appel à la religion de manière indigne, je reconnais, le débat me laissait perplexe. Jusqu’à ce que mes deux neurones se touchent, donc, ce court-circuit me rappelant que l’un de mes aphorismes préférés, que nous devons à « un certain Blaise Pascal » (Prévert, Paroles), est : « Tout le malheur du monde vient d'une seule chose qui est de ne pas savoir demeurer en repos dans une chambre ». Bah voilà ! … Un intello, ai-je un jour écrit, ce n’est pas quelqu’un qui visite le monde, c’est quelqu’un qui le convoque chaque jour dans sa chambre. Pas de chemin. Le débat tombe. Quel chemin ? … Tous les gens qui m’affirment que, ce qui importe, c’est le chemin, ont un sac à dos, des chaussures de marche et parcourent le monde avec le guide du routard en poche. Quel chemin ? … Intellectuel, alors ? Wouarfff ! … Plié en deux de rire. Intellectuel ! … Je l’ai, l’argument. Cette fois, je l’ai. Le seul voyage qui compte est celui qu’on fait dans sa tête. Et, celui-là, il dépend intégralement du but. Car il n’est pas de voyage de l’esprit qu’on n’entreprenne sans but. Sans but ni sans formation. Aucun. Désolé, camardes, l’important, dans l’existence, et pour tous, c’est le but. Il n’y a pas de voyage qui n’ait un but. Ne serait-ce que le but de voyager sans but. D’ailleurs, avec rien qu’un peu de cynisme, on pourrait penser que tous ces gens qui nous bassinent avec la beauté du voyage pourraient bien être ceux qui, à leur grand désespoir, n’auraient pas atteint leur but. L’être humain est ainsi fait qu’il parvient toujours à justifier ses errances à postériori. En ce sens, affirmer que l’important serait le voyage, c’est reconnaître sa faillite personnelle.




mercredi 22 juin 2016

Albert et la mort ...


Vous savez certainement que Camus n’est pas mon écrivain préféré. Je ne parle pas du reste. Pour moi, ce n’est même pas l’ombre d’un philosophe. Ce que j’ai contre lui ? Sa tronche de gendre idéal. Bien propre, bien poli et, avant tout, anticommuniste viscéral. Pas comme l’autre, là, Sartre … J’ai aussi contre lui d’avoir rêvé être une idole, un peu genre Dean, James, qui n’a réussi que grâce à sa gueule d’ange. Lui, James, il est mort dans un accident avec la Porsche qu’il conduisait, au moins. L’autre, le prix Nobel, il est mort dans un accident, tout pareil, mais pas au volant, et dans une Facel Vega. Minable. A ceux qui auraient encore un petit sentiment pour Albert, je conseille la lecture de « Meursault, contre-enquête » de Kamel Daoud. Tout simplement parce qu’il y aura toujours une différence entre un intellectuel qui défend de sa tour des idées dont le réel démontre qu’elles sont tragiques et ceux qui participent activement à des ignominies. Bref, ce monsieur sentencieux nous a asséné nombre de poncifs dont le fameux : « le seul problème philosophique sérieux est le suicide ». A son époque, cela pouvait passer pour pertinent. Tout simplement parce que l’église, avec quoi il entretenait une relation ambigüe, le condamnait absolument et que notre société était, en ces temps, baignée de cul-bénisme. Ce n’était donc, à mon avis, qu’une position circonstancielle et à très courte vue. Donc, en ce sens, assez peu philosophique. Une manière de s’acheter à bon compte une aura de « révolutionnaire ». A preuve, le fait que, cinquante et quelques années plus tard, le problème n’est plus central. De nos jours, le problème, c’est la mort. Voilà de l’éternel. Mais, curieusement, l’universalité de ce problème n’est plus le centre du débat. Car, au lieu de la considérer comme inéluctable, nos sociétés ont versé dans sa négation. Et même vers la négation de tous ses aspects, à commencer par le vieillissement, qui en est la première étape. Les rues sont pleines de sexas, de quiquas et de quadras en short, sur des planches ou patins à roulettes, sur des trottinettes, qui tentent pathétiquement d’oublier leur âge, de faire comme si la fin n’arrivait pas, qu’elle était encore loin. Résultat, on est passé d’une mort plus ou moins apprivoisée à une terreur généralisée. Au point que, tout le monde chiant dans son froc dès qu’on prononce le mot, que, d’ailleurs, on le dit de moins en moins, il est parti, il s’en est allé, nous a quittés, etc … , et que, même, on finit par ne plus en parler. Camus, le même, aurait dit une autre phrase profonde : « Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde ». Que serait-ce, alors, ne plus les nommer ? La mort est mon amie. Le suicide ni la mort ne sont pour moi des problèmes fondamentaux. Sauf, peut-être, leur disparition du discours général. Pas, en tous cas, leur existence qui n’est, pour moi, qu’un fait. Avec un avant et un après. Vide, l’après, bien entendu. Cette question est pour moi l’indice qui révèle imparablement la confusion entre transcendance et mysticisme, spiritualité et religion. C’est probablement une différence essentielle avec le reste du monde et Albert en particulier.

jeudi 18 février 2016

C'est non !...


C’est non !... Parfois, un être humain est amené à dire non, quoiqu’il lui en coûte et,là, pour moi, c’est non. Les plus incultes des lettrés vont croire que je fais ma crise Antigone. Je suis à des années lumière de cette adolescente entêtée. Très peu d’auteurs ont traité ce mythe avec subtilité en faisant, par exemple, une place à la raison d’état qui n’est pas qu’une manifestation concrète de la langue de bois. Être puissant suppose des devoirs, dont celui d’assumer ses choix, y compris quand l’histoire vous donne tort. Sartre aurait parlé de mains sales. Contrairement à mes contemporains, je ne me reconnais pas dans cette oiselle butée et, avant tout, indifférente aux avis qui divergent du sien. Ce qui n’est pas en soi condamnable si l’on ne tient pas compte du sujet de son entêtement. Vous auriez beau jeu de me reprocher d’être, moi aussi, totalement insensible à la doxa. Sauf que, pour moi, le problème qui se pose a à voir avec la majorité. La majorité qui, justement, de nos jours, adule la jeune Antigone. Or, la question est, fondamentalement, au nom de quoi ?.... Au nom de quoi Antigone se mobilise-t-elle ? Et la réponse est évidente. Au nom de la tradition. De cette tradition qui veut qu’un humain ne le serait que dans le respect de la dépouille de son prochain. Tradition qui, vous l’aurez remarqué, ne s’applique qu’aux proches, regardez, par exemple du côté du traitement que nous, blancs, réservons aux cadavres noirs ou basanés. Antigone met en jeu sa vie pour le cadavre de son … frère. Au nom de quoi ? De la transcendance. Antigone est, à ce titre, la défenderesse de l’unicité de la transcendance, qui serait, donc, la tradition et, par là, preuve de l’existence d’un être suprême. Et c’est donc là qu’on aperçoit, sous le voile de la résistance héroïque de l’adolescente face au pouvoir, la défense de l’existence du dieu. Et c’est là, donc, qu’on comprend le succès que notre époque lui réserve. Car nos temps sont croyants. C’est là, vous aurez compris, que je dis non.....

Je suis d’une génération nietzschéenne. N’en déplaise aux intellectuels de tous poils du temps présents, toutes les grandes références du siècle précédent le furent. Sartre, Camus, Deleuze, Palante, j’en passe, y compris Freud et Marx qui n’ont jamais avoué l’avoir lu et digéré ce qui, pourtant, est et fut tu car inavouable selon leur conception du monde. Nietzsche reste comme l’intellectuel qui a affirmé la mort de dieu. Dieu est mort, affirmation nietzschéenne fondatrice semble être tout ce qu’on en a retenu. Pourtant, cette affirmation est incomplète. Car Nietzsche donne l’explication de cette mort et affirme que, si dieu est mort, c’est parce que l’Homme, l’être humain dans son ensemble, l’a tué. Nietzsche ne nie pas la pertinence intellectuelle de l’existence d’un être suprême. Il nous dit simplement que, malgré nos dévotions de Tartuffe, nous sommes incapables d’affronter cette idée. Nietzsche est mort en 1900, il y a 116 ans, temps nécessaire à la reconquête pour la masse informe du peuple toujours prompt à glisser vers le plus confortable pour son esprit. Je suis né à une époque où la quetion posée par Nietzsche n’effrayait personne et, donc , pas plus moi qu’un autre. Pas de dieu au ciel, soit... Et, donc ?.. Que serait-ce, alors, que la transcendance humaine ? Il fallait se « prendre le chou », se torturer l’esprit, apprendre et apprendre encore mais nous le faisions dans la gaieté, comme nous l’avait suggéré le moustachu, dans la gaieté du savoir. C’est une époque où la question de dieu était évacuée. Je n’ai pas écrit « résolue ». Nous avions simplement le courage intellectuel de la laisser ouverte et d’en renvoyer la résolution à plus tard. Aucune angoisse ne naissait de ce diffèrement. Vous l’aurez remarqué, ce n’est plus le cas. La réponse, le peuple de France et, hélas, de la Terre entière, l’exige dans l’instant. Ce qui, évidemment aboutit à la défense de son dieu contre celui de l’autre, au clivage, à la guerre. Malraux, intellectuel croyant avait prédit, dit-on, que ce siècle serait spirituel ou ne serait pas. Cette phrase a aujourd’hui le même succès, exactement, que la jeune Antigone, fille d’Oedipe, pour la simple raison qu’elle conforte les culs-bénis de toutes les obédiences possibles. Comme la plupart des prophéties, celles-ci s’avèrera fausse, bien entendu, puisque le 21° siècle sera à la fois spirituel, c’est à dire tourné vers la seule spiritualité envisagée par les commun des mortels, celle d’un « dieu » au cœur du ciel, sera, donc, déique ET ne sera pas. Parce que nous n’avons évidemment pas tous le même dieu et que notre entêtement collectif à confondre transcendance et dieu ne nous amènera que la guerre.

C’est là que je dis non. Non, désolé, les télés pleines de dieu, de messes, de cérémonies, d’Allah, de Bouddha, de Javé, de dieu, de papes, de rabbins, d’imams, de bonzes, seraient-il français et anisés, c’est non. La figure de dieu comme seule grille d’analyse, c’est non. C’est non parce qu’il existe sur cette terre une foule innombrable de gens qui, non seulement n’ont pas besoin de cette hypothèse, comme disait Laplace, mais, en plus, condamnent avec force cette faillite de l’esprit que constitue la croyance en un dieu, en une idéologie, en un dogme, même laïc, condamnent les présidents cathos, les premiers ministres cathos, les penseurs cathos, les journalistes cathos, tous les cathos, tous les croyants, parce qu’ils sont l’expression d’une faillite de l’esprit humain et, donc, vouables aux gémonies. ... Contre mon époque, je continue de l’affirmer : dieu est une merde, dieu n’existe pas, dieu est mort et croire n’est pas plus respectable en soi que toute autre croyance. Dans mon pays, la France, croire est un droit mais n’en ouvre aucun, de la même manière qu’il y est permis de chasser sans que cela soit ni une obligation ni un bien. S’il existe une chose sacrée sur cette terre, cela ne peut pas être dieu. Ce pourrait être, éventuellement, s’il faut une transcendance, la vie. C’est non. C’est non et l’image de ce « non », c’est un majeur levé. Allez vous faire foutre !... C’est non. Dieu n’existe pas et je me fous totalement des explications qu’on tente de m’en fournir. Ce monde n’a pas besoin d’un dieu. Le seul responsable de la dérive de l’humanité, qui risque plus que jamais d’aboutir à son anéantissement, c’est l’être humain. Le déluge, s’il a lieu, sera notre œuvre. C’est non et je conchie toutes les religions. C’est non !...

samedi 12 décembre 2015

Parano ou schizo ?....


Nous sommes un certain nombre à n’avoir pas oublié la formule quasi définitive et néanmoins soixante-huitarde qui définit le mieux le choix politique offert par les « élites » au « peuple » : la dictature, c’est ferme ta gueule, la démocratie, c’est cause toujours. La formule est récente. Le fond du problème est antique. Citons, pour exemple, les écrits fameux de Machiavel. Mais l’histoire la philosophie regorge de discours, certains datant même d’avant l’ère chrétienne, sur la capacité du « peuple » à comprendre les enjeux, évidemment édictés par les dominants, du débat politique. Le concept, s’il est invariant au cours des siècles, n’en a pas moins évolué dans ses formulations. Pour me concentrer sur mon époque, parce qu’il n’est pas question, ici, de rédiger un essai à caractère exhaustif, je dirais qu’à l’ère industrielle correspond un moyen industriel de domination des consciences. Ce que je daterais, à peu près, de la naissance de la théorie capitaliste, disons, pour simplifier, avec Locke ou Smith. Mais ces noms ne suffisent pas à expliquer l’état actuel du débat. Il faut, pour comprendre intégrer aux concepts définis comme étant à l’origine du libéralisme économique, que nous sommes aujourd’hui, manifestement impuissants à dénoncer, les ajouts qu’y ont apportés tous les tenants plus ou moins conscients des théories psychanalytiques. Freud, évidemment, dont la dénonciation actuelle par des intellectuels rétifs et sensibles à la liberté de penser passe encore pour du dépit, simplement pour la raison que Freud ne peut pas être formellement identifié comme responsable de ce qu’il a engendré, du moins ne peut-on déterminer son degré d’engagement. Est-ce ou non, là, le résultat de ce qu’il concevait froidement ou bien un accident imprévu de ses pensées ?... Pour ses disciples libéraux, par contre, aucun doute n’est possible. Le but de Mr Barneys, neveu de Freud, par exemple, est clairement la manipulation des masses à but capitaliste, ce qu’il prouve par son implication dans l’univers de la publicité. Mais ce discours, qui semble viser uniquement Freud, pourrait tout aussi bien s’appliquer à Marx ou Nietzsche. Les interprétations de ces deux penseurs laissent également circonspect. Voulaient-ils vraiment ce que leurs interprètes ont déduit de leurs œuvres ou bien sont-ils totalement innocents ? Entendre, par exemple, Mr Minc dire, goguenard, qu’il est le dernier penseur marxiste de France ou la sœur de Nietzsche confirmer que son œuvre est authentiquement nazi ne peut que nous laisser sans voix. La manipulation des masses, si elle date de la naissance de l’humanité, a donc évolué au cours des siècles. Aujourd’hui, il me semble qu’elle a pris un tour quasi purement psychologique. Il me semble que, de nos jours, on ne laisse au peuple que le choix entre paranoïa et schizophrénie. Et ce fait me rappelle l’utilisation intensive de la normalité psychiatrique qu’ont pu faire toutes les sociétés et en tous temps, contre des artistes comme Van Gogh, par exemple, mais dont le champion reconnu restera l’Union Soviétique. Il me semble que l’époque actuelle démontre radicalement que nous ne valons guère mieux. Pour la paranoïa, il me semble inutile d’insister, en cette veille de second tour des élections régionales. Pour la schizophrénie, je pense à tous ces citoyens dont on exige qu’ils aient une attitude « écologique » irréprochable cependant qu’on les contraint à acheter pour Noël un tas de merdouilles « made in China » ou à prendre leur voiture pour aller chercher le pain..... Le choix du « peuple » est donc devenu simple et clair : tu t’aimes mieux parano ou schizo ? … La seule vraie différence, pour les dominants, c’est la marque du cachet à prendre chaque matin. Le choix vous appartient, évidemment, le principal étant que vous vous sentiez coupables de quelque chose. Restent tout un tas de gens, plus ou moins cultivés, qui, ayant quelque lucidité sur la condition humaine, ne souffrent pas outre mesure d’être à la fois paranos « et » schizo. Ce qui fait une très importante différence avec la masse, les paranos ne se sachant pas, en général, tels, pas plus que les schizo. Pour le pouvoir, le principal est que vous choisissiez entre l’un et l’autre afin de pouvoir vous opposer.... Les élections de demain sont, à ce titre, parfaitement démonstratives. Sur les affiches électorales, on voit très clairement l’opposition exclusive entre le camp des « paranos » qui vont voter à droite et le clan de schizo qui vont voter à gauche. Dans ce contexte, il est facile de voir en ceux, assez peu nombreux, qui ne veulent à aucun prix faire partie de l’un ou de l’autre camp sont dérangeants. Je parlerais à ce titre de personnes qui auraient le « même genre de beauté que moi ». Leur beauté est bien plus grave qu’on pourrait le croire : ils sont menaçants. Dans ce cas, le pouvoir possède une arme qu’il nomme « État d’Urgence »... Sous cette gouvernance, le pouvoir jouit d’un ensemble d’arguments propres à faire des récalcitrants un membre de l’un ou l’autre des groupes. On tape un peu sur le crâne des « gauchistes » dans l’espoir d’en faire enfin des « paranos », on montre à longueur d’antenne des images qui incitent les gens de bonne volonté à peser le pour et le contre de l’autorité abusive afin d’en faire des schizo.... Et vous, vous avez choisi quel camp ?.... Et vous, vous comprenez quand que choisir c’est se condamner ?....

vendredi 20 novembre 2015

Autrefois, le monde était dirigé par des malades. Aujourd’hui, il l’est par des crétins.


J’ai toujours été persuadé que les gens qui ont réponse à tout et rétorquent à la vitesse de l’éclair à toute proposition, ce qu’on croit l’indice d’une finesse d’esprit, ne sont, en vérité, que des crétins. Pour la simple et bonne raison que répondre dans l’instant à une problématique ne peut avoir qu’une explication : on n’a tout simplement pas compris la question. Ou, du moins, on n’a pas pris le temps d’en mesurer toute l’étendue. Toute question, aussi bête soit-elle, génère immédiatement une arborescence infinie de réponses possibles, suivant les différents angles envisageables, suivant le nombre incalculable de situations qu’elle suppose, suivant l’empathie réelle dont vous êtes capable, c’est à dire votre faculté à vous mettre réellement à la place de l’autre, dont vous ne savez rien, à priori, et dont vous devez envisager, alors, toutes les facettes. Cette espèce humaine très spéciale qu’on nomme « les intellos » se noie immanquablement sous le poids de toutes les implications envisageables, tout en en oubliant la majorité, d’ailleurs, ce qui a pour conséquence immédiate qu’un intellectuel commence toujours ses réponses par un silence. Mais le terme « toujours » est, comme il est normal, ici, usurpé. Parce que, hélas, les questions sont trop souvent convenues, entendues mille fois. Conséquence, le grand homme passe en mode automatique et répond du tac au tac, comme un vulgaire intellectuel de comptoir, mais, différence, répond néanmoins, dans tous les cas, une chose élaborée, longuement mûrie, analysée et plutôt intelligente, dans les meilleurs cas. C’est une chose que tous les personnages « à la mode », en vue, ont très bien comprise et que l’on nomme « langue de bois ». Une faille dans la cuirasse de l’intellectuel, qui en a beaucoup d’autres, et qui , pour lui, tient surtout à la fatigue et à son mépris du monde tel qu’il va. On le lui reproche suffisamment pour qu’il ne paraisse pas essentiel d’y insister. Par contre, cette constatation est, le plus généralement, la porte ouverte au concept de « trahison des clercs » dont on parlait autrefois, cet autrefois où l’on parlait encore de ces problématiques aujourd’hui jugées « has been », et qui, bien qu’elle soit un peu vieillotte, ce qui ne la condamne pas à l’oubli, voire n’obère guère sa capacité à passer dans l’histoire, garde, à mon sens, quelque acuité. Il n’est qu’à voir cette rumeur récente alertant sur le fait que la politique étrangère de la France ne se ferait plus au quai d’Orsay mais dans le bureau de BHL. Je suppose que jamais aucun procès ne condamnera le sieur BHL le jour où la politique extérieure de la France sera enfin montrée du doigt pour sa responsabilité dans l’état actuel du monde terrible dans lequel nous vivons. La langue de bois, c’est un langage adopté par les clercs, quels qu’ils soient, pour se vendre, donner cette impression qu’ils sont compétents en toute circonstance, qu’ils ont la réponse. Les clercs et les politiciens étant tous concernés, ils se repaissent évidemment des médias où ils sont interrogés par d’autres tenants de ce langage sans langage, ces questions sans questionnement. Si bien que nous sommes habitués aux discours creux, aux poncifs, en un mot : à la crétinerie. Je n’ai rien à en dire de plus. Si cela ne me plaît pas, je n’ai qu’à couper le son. Mon problème, c’est que la règle impose à tous le standard actuel des « réponses immédiates ». Particulièrement aux médias et aux politiciens. Il ne s’agit plus d’être intelligent. Il faut faire « le malin ». En quelques exemples simples : GW Bush, Sarkozy, Hollande, Valls, Poutine, Blair, Cameron... En gros, un fait divers, une loi, un attentat, une guerre. N’importe quel dirigeant un tant soit peu sensé prendrait au moins une à deux semaines de réflexion avant de modifier la loi, la constitution et, partant, le futur de son pays ou de mobiliser les troupes.. Les nôtres, non. Ça, c’est la preuve irréfutable de leur indécrottable crétinerie. D’une personne qui réagit trop tard, on dit souvent qu’il a l’esprit d’escalier, celui qui se manifeste une fois la porte refermée seulement. Peut-être devrait-on multiplier les escaliers dans les allées du pouvoir.



mardi 10 novembre 2015

Je suis une machine frappée d'obsolescence programmée


L’obsolescence programmée est une chose qui me concerne. Pas du point de vue matériel, non. Ce concept me concerne moi, moi en tant que personne. Je suis un être humain dont l’obsolescence a été programmée. De manière politique. Tout cela vient de la différence entre tradition et culture. Je suis né dans une famille que, à l’époque, on qualifiait de prolétaire. En ce temps, la culture était la propriété exclusive de la classe dirigeante. Avec des nuances, le mépris, par exemple, qu’on pouvait avoir pour les nouveaux riches, les B.O.F. au sortir de la guerre ( Beurre, Oeufs, Fromages, tous les gens qui s’étaient enrichis du marché noir) et toutes les madames sans-gêne. Le « peuple », quant à lui, avait des traditions. A commencer par la religion, différente selon les nations mais toujours instrument de domination et complice du pouvoir. La tradition, c’était aussi la guerre où l’on envoyait « la chair à canon ». La tradition, c’était aussi le folklore et tout un tas de cérémonies, certaines dite « de passage », comme le mariage ou le service militaire. Or, depuis la Révolution Française, une partie des élites s’est dissociée de sa classe de naissance et s’est attachée à faire partager la culture au peuple. Parmi ces mouvements, bien entendu, le communisme qui, on peut le lui reconnaître, à toujours mis au premier plan de ses préoccupations l’éducation des masses. Bien entendu derechef, cette éducation est soumise à caution, dans son côté manipulatoire et son caractère moult fois constaté de mensonge « plus beau que les anciens mensonges » ( Aragon in Les Poètes). Le paroxysme étant, pour ma génération, le « petit livre rouge » de Mao. Mais ce mensonge nouveau ne peut être jugé isolément du fait qu’il remplace un autre mensonge et que les tenants du pouvoir, eux-mêmes, se sont toujours évertué à enseigner au « peuple » des vertus qu’ils ne respectaient pas eux-mêmes. La religion, évidemment, la fidélité conjugale, les mœurs d’une manière générale, y compris une sexualité interdite, la gestion parcimonieuse de l’argent, le respect d’autrui, la générosité, ce que l’église appelle les péchés capitaux, dont on peut constater, pour tous, que si le paradis existait, les puissants n’y auraient manifestement pas droit. Mais, le paradis, c’est évidemment une création des dominants pour asseoir leur domination sur un peuple inculte, volontairement soumis par eux à l’inculture. Le paroxysme de la prise de pouvoir des « humbles » sur la culture dite « bourgeoise », c’est, pour moi et, je pense, d’une manière générale, 1968. Citer 68 fait aujourd’hui sourire. C’était pourtant tout sauf une plaisanterie. Cette année-là et celles qui l’ont suivie, ont marqué la prise de pouvoir d’une partie du peuple sur la culture. Pas dans la dénonciation de cette culture. Dans l’accaparement de cette culture. La motivation profonde était on ne peut plus claire : pour lutter contre le poids des traditions qui oppriment les masses et les maintiennent en ignorance, la seule solution est de l’éduquer. Pour nous, la culture, ce n’était rien d’autre qu’un processus rationnel pour éliminer les traditions, à commencer par la religion, parce qu’en prime, nous étions tous absolument agnostiques. Nous y avons beaucoup travaillé. En vain, comme nous l’allons voir. En 1968, la bourgeoisie française, autant culturelle qu’économique, a senti le vent du boulet. Si le peuple est cultivé, alors !... En quelques années, les masques sont tombés. A l’ennemi héréditaire du « bas peuple », il ne restait que deux solutions, cette fois nous en étions certains : s’excuser ou bien tomber dans le facisme, les phrases terribles de Goebells sur la culture, par exemple. Ma génération n’a pas su, pas pu, probablement, profiter de cet avantage. Parce que le pouvoir bourgeois est un Phénix. Même par terre, même en cendre, il sait renaître. Le double défi auquel il était confronté était clair : pour maintenir son pouvoir, discréditer les traditions, pour maintenir son pouvoir, trouver une autre forme de domination silencieuse et indolore. Son problème, c’étaient les gens comme moi, très nombreux à l’époque, réellement nés dans une étable entre un bœuf et un âne ( joke !..) et qui avaient lu. Beaucoup lu, beaucoup fréquenté les théâtres, écouté de la musique, classique compris, qui, donc, avaient visiblement franchi le mur sans avoir le passeport tamponné par les instances reconnues. Dès cet instant, pour eux, le niveau de culture ne pouvait donc plus rester un critère objectif de la valeur d’un homme selon leurs critères. Il fallait inventer une nouvelle sorte de religion. Le choix était évident : l’argent. Option possible, rétablir l’emprise de la religion sécularisée, option qui, aujourd’hui, est manifestement sur le devant de la scène. L’idée était simple et a marché, évidemment, puisqu’elle était simple, voire simpliste. On appelle cela la « propagande ». Quand on a de l’argent, on peut, par exemple, magouiller le marché de l’art et imposer comme géniaux des créations dont le peuple, toujours aussi ignorant, décidément, dira une chose imbécile : un enfant de cinq ans pourrait le faire. Le lapin de garenne ne voit jamais le piège qui va le tuer. Le but était évidemment de faire croire au peuple que « nous avons tous du talent ». Le critère, c’est évidemment combien ça se vend. Et, comme vous savez, l’argent, c’est pas nous qui l’avons. Le but final, c’était donc de rétablir la valeur de la « tradition » en face de ce que nous savons être, tous, la culture. Un africain qui taille sommairement un masque dans une écorce, c’est évidemment aussi intéressant qu’une toile de Van Gogh ou de Picasso. Un DJ, c’est pareil que Mozart, un slameur, c’est pareil qu’Aragon, un type qui a été un cancre stupide toute sa vie, a évidemment un discours aussi intéressant qu’un autre qui a tout lu, un type né dans les quartiers nord de Marseille est évidemment égal à celui qui est né à Neuilly, on n’est absolument pas xénophobes et un « arabe » c’est évidemment comme un « gaulois »....... Comment pourrait-on en douter ? Sauf que tout ça suppose qu’il n’y ait plus aucun miroir dans notre univers familier. Impossible de casser tous les miroirs. Il fallait donc en créer un nouveau, un primordial, un qui ferait oublier tous les autres. Ils ont appelé ça « la télé ». Ils y ont mis tout leur pognon. Tu l’allumes et tu es à l’écran. Pari gagné. Vous trouvez ces mots outranciers ? Pari gagné. Ce que vous devriez comprendre, c’est que c’était ça, le plan. Éliminer tous ces gens, dont je fais modestement partie, qui ont une vision décalée de la réalité sociétale. Mes camardes et moi, on s’est tout simplement fait baiser. Le problème, c’est que, personnellement, je ne vois pas vraiment la sortie. Aujourd’hui, vous semblez tous convaincus que la culture et la tradition, c’est pareil. Par exemple, un algérien est de « culture » arabe, un sénégalais de « culture » africaine. J’en ai le cul troué. Non, non, pas de « culture »... De tradition. La culture, c’est encore ce qui remet en cause les traditions, c’est le résultat d’un long apprentissage et non d’un hasard de naissance. D’ailleurs, regardez simplement dans quelles écoles les dominants font leurs études - et continuent d’y envoyer leurs descendants.... C’est tout simplement évident.....

Je suis donc bien la victime involontaire et sans rancune d’une obsolescence programmée politiquement et financièrement. Tout ma vie j’ai bossé pour être cultivé, bourgeoisement s’entend, et, quand j’y suis à peu près parvenu, la culture avait disparu, sous l’action concertée des puissances d’argent. Victime involontaire de l’une des seules périodes de l’histoire de notre pays où l’ascenseur social fonctionnait. Je n’en veux à personne. De ce voyage, j’ai gardé pour moi la culture, tout au long d’un chemin dont je me dis aujourd’hui que je n’aurais pas aimé en parcourir un autre. Par contre, à ceux qui trouveraient encore ça comique, je signale que le « parti de l’inculture » risque d’être prochainement aux manettes parce que vous l’aurez élu. Et, là, je pressens que ma culture pourrait enfin me servir à sauver ma peau......

dimanche 18 janvier 2015

Source

Serait-ce l'effet de ma formation scientifique ?, une idée me tient. En général devant un problème, une source de problème, bien que tout à fait conscient du fait que si une source pose problème, alors, la solution est dans la source, on ne songe à aucun instant à demander « à la source » la solution au problème qu'elle pose. Pour être concret, par exemple, demander à Total de résoudre les problèmes de pollution qu'il pose, demander à EdF de résoudre les problèmes que son « tout nucléaire » pose, demander à des politiciens de juger de la pertinence d'un projet qui leur rapporte de l'argent, tout ça, et j'en passe de bien meilleures, c'est tout bonnement aberrant. De la même manière, il me semble affligeant de demander aux religieux de donner leur solution aux problèmes que posent les religions. Il semble très bienséant et conforme au principe de « tolérance », ces temps-ci, de demander au pape, aux imams, aux rabins,  au Dalaï-lama, à qui voudrez qui dit croire, de résoudre le problème que pose la religion.... Mais, j'en suis désolé, c'est tout simplement extravaguant. Les seuls qui devraient avoir voix au chapitre, aujourd'hui, en France, ce sont les « républicains » et non les « démocrates ». Si vous ne savez pas quelle est la différence, interrogez le web, rubrique « Régis Debray ».... Or, ce que nous découvrons, justement, à l'occasion des derniers événements, c'est que notre pays n'est plus républicain....  et que, dans ce contexte, il devient normal d'interroger les sources du problème sur les solutions qu'elles proposent au problème qu'elles posent elles-mêmes. En gros …. C'est foutu.... Et c'est triste.....

vendredi 16 janvier 2015

Jeunesse éternelle


J'entends par-ci, par-là des intellectuels, des experts, des possesseurs de cerveaux, parfois, évoquer le souvenir de la bande à Baader, des brigades rouges, d'Action Directe, pour expliquer les derniers attentats qui se sont produits en France depuis l'affaire Mérah. La question étant, évidemment, de comprendre comment ces gens, qu'on a immédiatement classés dans la catégorie « terroristes islamiques », bien qu'ils soient tous français, tous enfants de la république française, produits de son école et des ses institutions, ont pu en arriver à de tels actes. Et bien je trouve pertinente la comparaison. A l'époque des terroristes de « gauche », on s'est empressé de tenter une responsabilisation de la gauche française et de ses dérives totalitaires. La vérité, c'est que la gauche française n'était en rien responsable et, donc, qu'aujourd'hui, le responsable n'est pas la religion musulmane. Tout simplement parce qu'il s'agit, dans les deux cas, de dérives très minoritaires d'une partie de la jeunesse en quête d'un idéal absolu. Une chose très ordinaire et dont tout le monde sait qu'elle nous est à tous commune : la difficulté à s'intégrer dans une société qu'on trouve à la fois injuste et peu désirable. Dans les années 70, cela se traduisait par la dénonciation du « métro, boulot, dodo »... Aujourd'hui, cela se traduit par la dénonciation du caractère inégalitaire en objectivement insupportable du capitalisme. Non, définitivement non, la religion n'y est pour rien. Elle n'est qu'un prétexte. Non, définitivement non, nous n'avons pas de problèmes avec les musulmans de France. Le seul réel problème que nous posent les réactions violentes de notre jeunesse, c'est une remise en cause de la manière dont nous avons choisi de faire « société ». En vérité, notre choix de faire ou non « société ». Notre profond désir de partager ou non. Je ne vous apprends rien : ces temps-ci, nous préférons tous, sans exception, notre propre devenir à celui du voisin. Ce que les esprits faibles nomment « l'individualisme » et qui est en vérité que de l’égoïsme. L’ambiguïté entre ces deux termes étant savamment entretenue par les pouvoirs en place, l'individualisme ayant pour but de faire de chacun de nous un être autonome et non prioritaire, une « personne », concept qui suppose la capacité de penser par soi-même et non comme le plus grand nombre. Mais, aujourd'hui, notre véritable problème, c'est que personne n'est en capacité de remettre en cause sa conception de lui-même, ce qui supposerait d'abandonner quelques privilèges et, souvent, les moyens du confort. Il est bien plus confortable, en fait, d'accuser un tiers. Aujourd'hui, ce tiers a un nom : islam. Cette dénonciation du choix d'un bouc émissaire ne m'empêche pas de considérer que, malgré Houellebecq, je n'affirme pas que l'Islam est la religion la plus con du monde mais que toutes se valent et qu'aucune n'est tolérable du point de vue de la raison. Comme beaucoup de nos « jeunes », je suis resté sensible à l'injustice. Accuser l'islam, comme on accusait et accuse encore la gauche française (voir le qualificatif « d'extrêmisme » largement appliqué aujourd'hui à Le Pen autant qu'à Mélenchon) est une injustice. Une injustice qui nous autorise à nous aveugler sur nous-mêmes. Et qui, donc, a de grandes chances de perdurer.

mercredi 7 janvier 2015

Houellebecq

Je n'ai pas lu Houellebecq, le dernier, je veux dire. Mais ce livre semble poser une question qui m'a toujours intéressé : êtes-vous capables de vivre sans dieu ? Si j'en crois les pensées de TOUS mes contacts FB, la réponse semble bien être non.... Houellebecq vient de signer, à mon sens, et je pense qu'il a raison, hélas, une sorte de clôture de la tentative nietzschéenne d'un monde sans divin... Je le reconnais, ce constat me troue le cul... Mais, comme lui, j'ai envie de vous renvoyer à votre pathétique : c'est quand même vous qui faites en sorte que dieu va revenir.... Quelle qu'en soit la forme..... Je pense que, en ce sens, Houellebecq a raison : vous êtes capables de vous "soumettre" à Allah, à défaut d'autre chose.... Mes hommages à Télérama, à France-cul, à France-Inter, à FR3, à France 2, et, plus ou moins, à tous les médias sauf deux : l'Huma et Charlie-Hebdo.....

mercredi 23 avril 2014

Jankélévitch selon France-Cul, la très catholique.....

Sur France-cul, ce mercredi, discours autour du livre « Logique de la mort » de Pierre-Michel Klein, livre qui revient sur la conception de la mort de Jankelevitch. . La mort ! … Camus disait que le seul sujet philosophique est le suicide. Je crains d'être une fois encore en désaccord. Il n'y a pas d'autre sujet que la mort en philosophie, serait-ce sous sa forme suicide. Un petit bout de la lorgnette qui ne m'étonne guère de la part de Camus. Qu'avons-nous ? Un Vladimir qui nous dirait, par delà le tombeau, sa conception de la mort, non comme la décrivait l'épicurien moyen, un non-événement, ni comme le décrivaient Platon ou Aristote, dans l'espoir d'une survivance, de l'âme ou de quelque chose. La critique semble donc complète. Pourtant, selon Klein, s'exprimant en lieu et place de Jankélévitch ( un peu à la manière d'un Platon transmettant la pensée de Socrate, alors que Socrate, lui, nie toute « survivance » et que Platon en est l'un des inventeurs), Jankélévitch aurait trouvé la clé de l'espérance, dans cette idée que le fait d'avoir vécu n'est pas effaçable. Le court moment qui sépare ma naissance de ma mort est à jamais inscrit. Je suis éternel. Une théorie, donc, qui se termine, comme tellement d'autres, sur cette idée d'une éternité, et, surtout, dans l'espérance. Jankélévitch serait donc seulement un philosophe de plus à nous vendre un espoir d'éternité. Non religieuse, non physique, certes, mais une espérance. Alléluia ! Au cours de l'émission, Klein nous sert une allégorie jankélévienne. Selon lui, la mort ne peut être considérée comme « rien » puisqu'elle est la goutte d'eau qui fait déborder le vase de la vie, un événement dernier, un acte, un moment qui existe bel et bien et serait unique, puisque dernier. Je trouve qu'il y a ici une bonne grosse blague. Car la dernière goutte ne le sera jamais que parce qu'il y a eu toutes les autres. A commencer par la première : qui ne naît pas ne peut mourir. Mais si la dixième, votre première dent, la millième, votre mariage ou la deux millième, la naissance de votre premier enfant, si la mille deux centième, l'achat de votre belle auto, toutes les autres, n'avaient existé, cette dernière n'aurait jamais été la dernière. Ce qui induit que cette dernière, en vérité, n'est pas plus importante qu'aucune autre. Sa seule importance est factuelle. Il se trouve qu'elle est la dernière, ce qui ne lui donne aucune particularité autre que que son rang. Et également qu'elle signe votre fin, raison pour laquelle vous la désignez comme responsable. L'Être humain est stupide jusqu'au bout et Jankélévitch peut remballer son espérance. Méfiez-vous au-delà de tout de tous les philosophes qui vous orientent vers un espoir. Si vous faites le ménage dans votre bibliothèque selon ce critère, il ne vous restera que quelques livres à lire. Ce sont, bien entendu, les plus intéressants.

dimanche 30 juin 2013

Raphaël, 4 consonnes et 3 voyelles.....


Sur France 4, hier, dans la nuit (vers 2h... La nuit, la télé, c'est captivant), j'ai vu Raphaël, celui de la chanson de Carla... Quatre consonnes et trois voyelles... Il venait parler, dans une émission littéraire, on en rirait si ce n'était pas si minable, du mot littéraire, je veux dire, parler, donc, de son dernier opus en date, chez Gallimard, évidemment, « Matière Première ». Je n'ai pas lu ce livre et je ne le lirai pas, d'ailleurs. Raphaël lui-même ne s'est pas gratté, au passage, pour dire la même chose d' « indignez-vous » de Hessel. Chacun ses intolérances, pas vrai ? En quelques minutes, Enthoven a exposé ses démons avec une maestria qu'on doit lui reconnaître. Le jeune homme a du talent, c'est indéniable. Un talent médiatique. Un bon client, on dit, il paraît, dans les milieux audiovisuels. En très peu de temps, il a réussi à vômir sa haine de Stéphane Hessel, de Marx, ainsi que son amour pour Albert Camus, dont vous savez ce que j'en pense. Comme par hasard, le meilleur qualificatif que je pourrais trouver pour Albert serait : gendre idéal. Ce qui est exactement le cas de Raphaël. Propre sur lui, tronche de premier de la classe conviendraient également. Aux deux. Avec, en outre, un respect immense pour la « culture » officielle, du bon côté, pour l'un, Raphaël, grand bourgeois, de l'autre, pour Albert, fils du peuple qui a toujours rêvé « d'en faire partie ». Ils sont d'accord, en particulier sur la haine du communiste. Ce qui les rend très sympathiques au belles-mères rancies qui peuplent la France. Raphaël adore se poser comme avatar de la « nouvelle philosophie », celle qui a, c'est ce qu'elle croit, fait tomber le mur de Berlin, pour aboutir, finalement, à une proximité de pensée avec un certain Sarkozy, en la personne des sieurs Glucksman et, dans une moindre mesure, Levy. Raphaël, lui, est allé jusqu'au bout de ses idées, puisqu'il en est arrivé à partager sa compagne et son enfant avec Nicolas. L'anticommunisme, comme le communisme, d'ailleurs, est un cancer de la pensée. Pour contester Hessel, Raphaël en arrive à invoquer Rosset. Son dernier livre n'est d'ailleurs, en vérité, qu'une copie ( je n'ai pas écrit « pâle »...) du livre « Le démon de la tautologie » de Rosset, qui opposerait, selon Raphaël, la révolte et l'indignation. Or, il me semble que, justement, opposer relève du problème posé. Comme l'écrit Rosset : « Il y a de l'idéologie dans la lutte contre les idéologies ». Ce que Raphaël lui même traduit en langage fleuri, pour être sûr que la plèbe puisse comprendre, par : « combien il faut être con soi-même pour prendre au sérieux les idées d’un con ». Et je suis à peu près certain, cher Raphaël, qu'il y a de l'idéologie dans votre volonté d'en découdre absolument avec Hessel, son petit opuscule, et, peut-être, avec ses ventes record. J'ai lu Hessel. Ses quelques pages sommaires. Et je n'y ai vu personnellement aucun intérêt. Néanmoins, et malgré son engagement aux côtés de Mélenchon, je n'y ai pas trouvé d'idéologie communiste ou marxiste. Une idéologie, certes, mais bien plus proche du christianisme, de ses dogmes « concons » ou « gnangnans », comme le disent ou l'écrivent certains à propos des indignés, bien plus proche de la « charité » que du charabia révolutionnaire. Et cette idéologie-là, manifestement, cher Raphaël, elle ne vous dérange pas plus que ça.... Pour moi, Rosset n'oppose pas. Il analyse d'un côté l'indignation et, de l'autre, la révolte. Il préfère manifestement la révolte mais sans énocer à aucun moment que la révolte serait LA solution à tous nos problèmes. Je le perçois bien plus en lutte contre « la morale » que contre l'indignation, qui n'en serait, selon lui, et à mon humble avis de plébéien, qu'une forme. Mais pourriez-vous jurer, cher quatre consonnes et trois voyelles, que vous ne nous faites pas vous-même, livre après livre, émission après émission, conférence après conférence, ce qu'on appelait autrefois « la morale ». Vous savez, ça c'est bien et ça c'est caca ….

Mais, pour finir, le point sur lequel je voudrais insister, cher Raphaël, quatre consonnes et trois voyelles, porte sur une autre écrit de Clément Rosset... « Le véritable révolté se cultive en silence....». Dites-moi pourquoi, puisque vous avez choisi votre camp, celui de la révolte, vous êtes si bavard ? Je vous entends déjà me répondre : pour moi, Rosset n'est pas une bible.... et moi, je pense que si, que c'est exactement le problème. En grand bourgeois de la pensée, vous « piochez » sans arrêt, parmi vos illustres prédécesseurs, depuis l'antiquité, les idées, voire, parfois, les phrases, souvent extraites de leur contexte, qui vous arrangent, comme si une bibliothèque pouvait s'assimiler à un gigantesque supermarché où l'on s'enquiert du produit qui va nous satisfaire. La base de votre raisonnement est l'anticommunisme ( tout aussi « con » que le « communisme », c'est vous et Rosset qui le dites …). J'en suis navré, cher 4 – 3, mais vous êtes pour moi largement aussi « con » (c'est vous qui le dites) que les « cons » que vous pourfendez.

Votre seul argument, au final, au cours de cette émission nocturne de France 4, chaîne publique, financée sur les deniers de ceux que vous méprisez tant, serait le fait que les « indignés » dormiraient tranquilles alors que les « révoltés » auraient des nuits agitées. Je demanderais bien à Carla, pour voir, comment sont les nuits de Raphaël. L'exemple du révolté, pour vous, étant Camus, bien entendu. Un révolté qui va finir sa vie dans une Facel Véga, l'une des plus chères voitures de « sport » jamais construites au monde, avec, au volant, Michel Gallimard, héritier en titre de la dynastie. On raconte même que cet accident n'en aurait pas été un et que le véhicule aurait été trafiqué par le KGB... Si, si, vous avez bien lu... C'était en août 2011 dans il corriera della sera (et c'est ICI). Que Raphaël en appelle à Rosset est un pur scandale. Si vous n'êtes pas encore convaincus, regardez simplement la tenue de 4 – 3 lorsqu'il vient sur les écrans ( l'autre c'était Kenzo, celui-là, j'ai pas idée.... Dolce et Gabbana ? Zadig de Voltaire ?..) et comparez-la à la chemise sempiternelle, bleue et à carreaux, de Clément. Un détail ?... Certes.. un détail.. qui tient à une notion qui vous est étrangère, cher 4 – 3, l'anonymat ….. Révolté ?????? !!!! .. c'est à pisser de rire ! ….

lundi 17 juin 2013

Blang ! ... ( bruit de vaisselle cassée..)


Je vais vous faire part de l'une de mes convictions profondes.... Une chose intuitive dont, si j'avais un peu de courage et d'opiniâtreté, je pourrais faire une théorie, une théorie qui serait d'emblée incorrecte et, par là, novatrice …. Mais mes proches vous le diront : j'ai toujours manqué d'ambition, ce mal qui ronge à peu près tout sur terre, qui est, selon moi, la cause de l'état actuel des choses... contrairement à la plupart de mes congénères.... Le fond de ma pensée porte sur un sujet ontologique... Peut-être « le » sujet ontologique... Les philosophes, les médecins, les tenants de la spiritualité mystique, tous les gens, en gros, qui font l'actualité, pour ne pas dire la « mode » de la « « pensée », tous, vous diront que l'être humain ne peut l'être, humain, que dans son rapport avec l'autre.. Mieux !... Que, sans l'autre, l'humain ne l'est pas …. En trois secondes, je viens de balayer toutes les convictions humaines, l'humanité, en premier, le langage, la grégarité, la société, etc.., et, non seulement, de les parcourir, mais, en plus, de les railler... Non ! … je suis formel... Tout ça est de la soupe, du galimatias, de l'inutile !... Tout ce discours n'a finalement qu'un but ... vous faire endosser les erreurs et les errements des générations qui nous ont précédés.... En espérant que, braves que vous êtes, vous n'aurez qu'un désir : les continuer. Un peu comme les « youyous » des femmes musulmanes qui en ont tellement chié de la pesanteur des « traditions » qu'elles n'envisagent qu'une seule solution : que les « jeunes » en chient autant... Non ! ... définitivement.... contre la bien-pensance d'un Albert Jacquart, par exemple, ou d'un abbé Pierre, d'un Enthoven, d'un Onfray, même, j'ose le dire : je ne trouve en moi aucune humanité que je doive à quiconque... Si humanité il y a, je pense qu'elle est plutôt d'ordre ontologique et que, à l'inverse de ce qui est admis généralement, c'est à cette part de moi-même que je dois l'invention du langage et non le contraire... J'ai le « sentiment » que, sans les autres, je serais quand même humain, que je ne deviendrais pas une bête comme les autres, comme on tente de nous le faire croire. Et je le répète : ma conviction profonde est que, au travers de cette belle légende, la pensée dominante n'a fait qu'inventer le moyen de transmettre une certaine forme de domination, d'esclavage, d'aliénation....

lundi 10 juin 2013

Minuscule

Un détail me met en ce moment assez facilement hors de moi... c'est l'emploi du verbe "arriver" en lieu et place de "parvenir".... On est peu de choses, je vous le concède.... S'enrager tout seul dans son coin sur l'emploi d'arriver ou de parvenir, quelle dérision !.. Pathétique !... Pourtant, si vous prenez le temps d'y penser.... Arriver signifie ligne d'arrivée, but, fin du parcours.... Un absolu, en quelque sorte.... Parvenir signifie plutôt étape.. Ça, c'est fait !..., en langage courant .... Pour prendre un exemple qui m'est cher : lorsque l'un de vos textes devient un livre, grâce à un éditeur, suis-je arrivé à me faire reconnaître en tant qu'écrivain ou bien y suis-je parvenu ?.... J'en suis navré, mais ce simple "détail" est pour moi essentiel ... Dans un cas, je suis définitivement "écrivain", dans l'autre j'ai franchi une étape qui sera bien vite remise en cause.... Le "diable est dans les détails", disait l'autre... L'emploi de l'un ou de l'autre dit finalement beaucoup sur qui emploie l'un ou l'autre.... Je vous invite à écouter tous nos personnages médiatiques et à constater, simplement... On ne "parvient" plus.. on arrive. Parvenir contient cette idée troublante qu'on pourrait penser y parvenir alors qu'on y est, en fait, arrivé.. Ce qui reprend le mythe du juif errant, celui qui cherche par devant ce qui est advenu en arrière de sa vie.... Eh oui !... Quand on pense, on est face à un écheveau inextricable... Bien obligé de tirer sur le bout de fil qui dépasse.... Et voilà toute la pensée structuraliste...  la présence du monde entier dans un simple verre, pour reprendre un poncif. Arriver, parvenir, une peccadille qui dit tout... En manière de conclusion, cette phrase absolument réjouissante : "Tout est dans tout, et réciproquement... le reste est dans  Victor Hugo".  Serais-je parvenu à vous convaincre?..... Pour en revenir à moi, puisque, comme vous le savez, il n'y a que cela qui m'intéresse, je me sens définitivement de la tradition de ceux qui parviennent et à jamais ennemi de ceux qui arrivent..... Un clivage pour moi essentiel.....

jeudi 24 janvier 2013

Badiou sur France Cul

Le philosophe marxiste est mystique. Rien de bien neuf. Il vous jurera son grand dieu qu'il ne « croit » pas et, pourtant, il croit. Le philosophe marxiste a beaucoup de défauts, toujours rien de nouveau, mais, le principal, c'est qu'il croit. Et ce défaut en fait un être absolument sans crédibilité. Une maison sur pilotis sans pilotis. La base est pourrie. Son mysticisme n'est pas chrétien, ni musulman, ni juif (quoique !..), ni bouddhiste ( ??...), son mysticisme tient à une seule chose : il « croit » en l'existence de la « vérité ». Et sa démarche philosophique consiste à trouver cette « vérité » transcendantale, qui le dépasse, qui nous dépasse. Sa nature a horreur du vide. Il en conclut que « la » nature a horreur du vide et que, s'il conteste l'existence d'un dieu, il ne peut laisser cette place vide. Vieux débat, auquel tous les philosophes, de tous temps, ont participé, en y apportant leur propre pierre. Platon, évidemment, Aristote, mais également Robespierre, Marx, Lénine, Mao,... Il existe un autre courant de pensée. Celui qui réfute l'existence même d'une « vérité ». Vieille lune, me direz-vous. Certes. Mais entendre Badiou, dernier philosophe « communiste », peut-être marxiste, se répandre, sur France-Culture, chaîne catholique s'il en est, en analyses soi disant « objectives » et « galimatiesques » sur dieu, St Paul et Platon, en tentant de nous les faire prendre pour les inventeurs du « communisme », franchement, ça troue le cul.... Et, même si je crains qu'il ne s'en aperçoive guère, cela prouve définitivement le mysticisme des derniers philosophes marxistes. Une balle dans le pied, on dit, en langage courant. Obsolète…...

mercredi 12 décembre 2012

Molaire, moléculaire.... Felix Guattari - La révolution moléculaire

Il ne s'agit pas ici, bien évidemment, des dents du fond mais de « mole », c'est à dire, symboliquement, d'un ensemble, d'un « grand nombre ». Rencontrant par hasard ce texte de Guattari, j'y trouve, en premier lieu, la confirmation de l'une de mes convictions profondes, celle que tout a déjà été pensé. Ou bien, variante, que ce qui se pense se pense à la fois dans plusieurs lieux et dans l'esprit de différentes personnes. En reprenant l'histoire des sciences, on se rend immédiatement compte de la pertinence de cette notion, au travers de la difficulté que nous avons toujours d'attribuer telle ou telle invention à celui-ci plutôt qu'à celui-là. De quoi s'agit-il, donc ?... Le but est de réfléchir la différence, l'opposition, même , en définitive, entre comportement « de masse » et comportement « individuel ». Une mole d'air peut avoir un comportement global, un vent, par exemple, ce qui n'interdit absolument pas une étude au niveau moléculaire qui démontrera qu'il existe au moins une molécule qui ne se comporte pas comme la généralité des molécules, le vent, et qui, même, parfois, peut avoir un déplacement instantané contraire à celui de l'ensemble. De même pour un courant d'eau. Au sein d'une rivière, il existe au moins une molécule d'eau qui remonte le courant. Or, en mathématiques, la notion de contraire se définit ainsi : le contraire de la phrase « tous les Bretons sont alcooliques » est : « il existe au moins un Breton qui n'est pas alcoolique ». L'application brutale de la science mathématique à nos sociétés implique donc que « l'individu » serait le contraire de « l'ensemble ». Or, depuis de nombreuses années, maintenant, les sciences sociales, la politique, entérinant cette opposition, portent leur regard, tout à fait ordinairement, à cause d'un manichéisme ambiant et général, sur « l'individu » plutôt que sur le « global ». Ce qui importe, aujourd'hui, c'est « vous » et non votre contexte, ni vos origines, ni vos traditions, ni votre culture. Chacun d'entre nous a droit à la parole, simplement parce qu'il est, qu'il en a le « droit », qu'il est « vivant ». Nonobstant, bien évidemment, le contexte, le global, le « molaire ». Ceci nous est venu d'une tradition très active à la surface de cette planète, l'anglo-saxone, qui ne peut être réduite à « l'états-unienne » mais qui lui doit la majorité de ses traditions. Pour les anglo-saxons, chacun d'entre nous est « surpuissant », c'est à dire, très simplement, que l'état du monde ne dépend que de lui. Ce qu'il ne saisit pas, c'est qu'il ne parle que de « son » monde. Pour lui, aucune différence entre ce qu'il pense et ce qu' « on » pense. Il n'est pas « un » individu, il est « l'individu ». Sa pensée est forcément celle des autres. Il pense pour tout le monde. Ceci, simplement parce que l'attention du monde extérieur n'est portée que sur d'autres « individus » et que son moteur n'a qu'une base : aucun autre « individu » ne vaut plus que lui-même, en termes de droit. Depuis des années, maintenant, j'ai une objection, toujours le même exemple, à ce joli tas de rouages bien huilés qui tourne rond : expliquez-moi quelle chance avait un enfant juif né à Varsovie en 1930.... Quelle emprise sur sa vie est la sienne? Réponse : aucune..... Il va partir pour Auschwitz et y sera assassiné. Avec cet exemple, on comprend que, quelle que soit l'agitation « moléculaire » d'un individu, sa destiné « molaire » reste la plus déterminante. Ce qui va diriger la courte existence de cet enfant, c'est qu'il naît à un certain endroit, juif, et à une certaine époque. Rien n'y fera.... L'air du temps est à l'autodétermination. Au point qu'on revisite régulièrement l'Histoire avec un microscope, en tentant de raconter celle-ci non plus sous un angle global mais sous l'angle du particulier. Les motivations de tel dictateur, de tel ou tel officier allemand, de tel soldat au Vietnam, de tel Poilu, de tel politicien, en essayant toujours de valoriser le choix personnel et en oubliant ce qu'on pourrait appeler « le vent de l'histoire ». Or, il n'y a pas d'opposition entre les deux et l'un n'est pas plus efficace pour expliquer seul le cours des choses que l'autre. L'histoire est molaire et vous emporte dans son flot, ce qui n'empêche en rien que, dans ce flot, vous pouvez avoir une agitation contraire à l'ensemble. Exactement comme une molécule d'eau prise au sein d'une rivière peut très bien, à certains moments, en remonter le cours..... Ce qui n'empêche en rien une contradiction peu traitée dans les sociétés occidentales: le « vent de l'Histoire » peut s'avérer déterminant pour chacun d'entre nous, quelles que soient nos agitations. Voir à, ce sujet les bouleversements actuellement à l'oeuvre dans le monde arabe. La thèse de Guattari, si j'ai bien compris, c'est qu'il n'y a révolution que lorsque le moléculaire rejoint le molaire, c'est à dire quand chaque individu pris dans un groupe s'accapare personnellement le mouvement d'ensemble et en devient un moteur individuel. Son livre me semble poser un problème philosophique essentiel, qui a à voir avec l'un de mes dadas, l'individualisme de gauche. Et, à mon avis, poser simplement ce problème, aujourd'hui, est tout bonnement génial. Au sens propre. Faut-il rappeler que Guattari fut le collaborateur préféré de Deleuze ?.... La révolution moléculaire - Félix Guattari - Ed. Les Prairies Ordinaires (novembre 2012)

jeudi 4 octobre 2012

Ras le bol

Je traverse une période d’intense malaise. Presque d’ordre psychiatrique. Une espèce de rupture, en moi, entre le corps, ce qui respire et bat en moi, et l’esprit. D’accord, vous dites-vous. Mais qu’est que cela vient faire sur un blog dont  l’intitulé est : “philo”. C’est tout simplement que je crois avoir déniché un embryon d’explication à ce malaise. La question n’a rien à faire ici, si vous voulez, mais la réponse, oui. Et cette réponse commence par une constatation : je suis français. Aucune gloire, pour moi, à être ce qui n’est que le fruit d’un hasard à la fois géographique et génétique. Aucun patriotisme d’aucune sorte en moi. Cependant, je ne peux le nier : je suis né en France. Et, conséquence, mon éducation est française. Ce qu’on peut appeler ma culture l’est donc également. J’ai de la chance, me direz-vous, puisque, question culture, la France est ce qu’on peut faire de mieux ou à peu près et, si je devais donner mon avis, je dirais même que c’est la culture la plus complète au monde, n’en déplaise aux ethnologues relativistes. Pour moi, donc, et parce que je suis né sur ce territoire, les notions de pays et de culture sont confondus. Je suppose que pour un espagnol, par exemple, cette confusion entre culture française et France est exclue. Comme tout bon français, j’ai été biberonné aux concepts issus des événements qui ont jalonné notre histoire: la Révolution, les Lumières, le seconde guerre mondiale, entre autres. Et, bien entendu, ma culture livresque est fondée sur la lecture, en premier lieu, des écrivains de langue française, Hugo, Rimbaud, Baudelaire, Aragon, Diderot, Molière, et tous les autres.... Bien sûr, j’ai lu des auteurs étrangers. Enormément et de toutes origines.  Mais, sauf cas rares, je ne les ai pas lus dans leur langue d’origine mais dans une traduction en français. Tout ceci pour vous faire saisir que, jusqu’à une date récente, il y avait, en moi, une fusion naturelle entre ma nationalité et mon être profond. Encore une fois, sans aucune fierté ni aucune revendication. Seulement voilà.... Depuis quelques temps, la France m’emmerde. J’ai rejoint le club très fermé des penseurs qui détestent leur peuple. Nietzsche, évidemment, mais également Bernhardt, Becket, à un niveau moindre, Joyce, probablement, Wilde, on comprend pourquoi, enfin bref, que du beau monde. Du beau monde dont la pensée, en tous cas, est assez peu amène avec le pays qui les a vus naître. Ce qui m’arrive n’est donc pas très original. Et ce qui m’arrive est tout bête: je finis par vous détester. Vous abhorrer, même. Rien de ce qui vous mobilise ne trouve grâce à mes yeux. La politique, vous êtes lamentables, là, quand même, le sport, j’ai toujours détesté le sport, mais là, vos médaillés, vos héros, vos crétins en shorts, pardon !.., vos lectures, on ne va en citer qu’un, un qui a le dos large, parce que, dans ce milieu, on ne peut pas dire du mal des collègues, disons Levy, ce que vous allez voir au cinéma, les intouchables est la dernière connerie en date, vos convictions religieuses, faut vous voir sauter à pieds joints dans la guerre de religions, votre addiction aux jeux de hasard et à la Française des jeux, qui m’interdit chaque jour l’accès au comptoir de mon buraliste préféré, votre amour du gasoil et du nucléaire, totalement ineptes au regard de l’avenir, celui de vos enfants en particulier, votre abord aux questions sanitaires, totalement paranoïaque, votre relation à l’argent, la musique que vous écoutez, affligeante, les “comiques” qui vous font rire, jamais drôles, déplorables, vos idoles, d’une manière générale, un tas de crétins congénitaux, à croire que vous n’élisez au pinacle que qui vous ressemble, histoire de préserver l’idée que ça pourrait vous arriver, tout, tout, tout.... Exhaustivité impossible... TOUT. Tout dans le médiocre, le navrant. Vous allez me dire que la terre ne va pas s’arrêter de tourner parce que je vous déteste et vous aurez raison. Vous allez me dire que j’ai qu’à me barrer, que ça fera de la place, que j’ai qu’à trouver mieux, si j’y parviens... Et là, je vais vous répondre. Si, un jour, lassé, à bout, je finis par émigrer, vous abandonner à votre bain de lisier, j’aurais fait un grand pas sur mon chemin personnel... Tout simplement parce que, dans un autre pays, les gens ne s’exprimeront pas en français et que je n’aurais plus à supporter cette impression permanente de souillure de mon esprit, que, dans un lieu étranger, la séparation entre mon esprit et mon corps ne sera plus un problème puisqu’elle sera évidente. Vous devriez, à ce sujet, lire un texte fondateur, pour moi: “Je suis comme une truie qui doute”, de Claude Duneton...... Je viens tout simplement de comprendre que jamais, jamais, le peuple de France ne sera à la hauteur de son héritage culturel.... Pas même moi. Et, ce, peut-être, parce que j’ai jusqu’à présent choisi d’y vivre. Je viens d’un temps oublié qu’il est convenu d’appeler les années 70. Dans ce temps, on pouvait voir, sur les écrans, sur scène, dans les librairies, des choses formidables. Un tas de choses formidables. Parmi elles, un film : “Allemagne mère blafarde”, de Helma Sanders-Brahms. Dans ce film, l’héroine, au sortir de la seconde guerre mondiale, qu’elle traverse avec beaucoup de souffrance, tente de recouvrer une vie normale. Mais son corps s’exprime. Elle est saisie, subitement, d’une paralysie faciale qui lui interdit de s’exprimer. Son visage est séparé en deux, un côté paralysé, un côté normal. Sur l’écran, on voit la douleur d’un peuple, le peuple allemand, qui s’est vu infliger par les vainqueurs une séparation déchirante entre Allemagne de l’est et de l’ouest. Parfois, la séparation entre corps et esprit se voit, se manifeste, prend corps, s’incarne. Et, donc, est.....

dimanche 15 avril 2012

Livres

«Ceux qui brûlent des livres finissent tôt ou tard par brûler des hommes». Heinrich Heine (1797-1856). Cette citation de Heine est très souvent appliquée au troisième Reich. Ce qui peut paraître anachronique, puisqu’il écrivait cela au dix neuvième siècle et que, à n’en pas douter, il faisait plutôt référence à l’inquisition et au passage aux bûchers d’hérétiques après qu’on a brûlé des livres interdits. Peut-être fait-il, même, allusion au glissement sémantique qui a conduit à nommer “autodafé” les bûchers d’hérétiques et non plus de livres. On parle donc de phrase “visionnaire”, puisqu’elle semblerait annoncer, justement, les crimes nazis. Là encore, on peut s’interroger sur la chronologie des faits. Dès 1925, dans mein kampf, Hitler faisait allusion aux juifs, aux communistes et aux Tziganes comme éléments “non allemands”. Et, à n’en pas douter, l’idée même d’élimination de ces populations pourrait bien avoir germé dans son esprit malade bien avant 1933, date du grand autodafé nazi. On peut donc s’interroger sur des variantes de la phrase de Heine: ne seraient-ce pas plutôt ceux qui peuvent brûler des hommes qui brûlent des livres? Ce qui m’embête un peu plus dans cette phrase, très utilisée par les penseurs romantiques au grand coeur, c’est l’espèce d’équivalence, qu’elle contient indéniablement, entre hommes et livres. Tout écrivain raisonnablement sensé devrait convenir qu’on doit pouvoir donner tous les livres pour sauver un homme, à plus forte raison une communauté. Les livres sont des productions humaines et leur côté sacré n’est pas, à première vue, évident. Sauf à considérer que tout livre est une réplique “du livre”. Une mystique, en quelque sorte. La “religion” du livre. Que serait le monde sans livres, me direz-vous? Il est certain qu’il serait autre. Meilleur? Pire? Qui peut dire? Mais il est un cas où l’assimilation entre livre et Humain ne peut s’opérer. Je veux parler des civilisations orales, comme il en existait, par exemple, et il y a peu, comme il en existe encore, en, Asie, en Afrique, avec les célèbres Griots. Un Griot qui meurt c’est une bibliothèque qui brûle, disait-on à l’envi. Dans ces sociétés, en tous cas, pas question de brûler des livres, même pas de savoir si l’on commence par le livre ou par l’Homme, ce qui n’a en rien empêché de brûler des Hommes. Il y aurait là comme une déconnexion entre les deux que je n’en serais pas étonné. Ce qui me donne à penser que l’équivalence livre-Homme ne peut avoir lieu que dans un seul endroit. Et, cet endroit, c’est évidemment le cerveau du tortionnaire. Ce personnage est un être illuminé, au mieux, fanatique et barbare, en général, inculte, la plupart du temps. Pour lui, pour ses acolytes fanatisés, un être humain n’a pas plus de valeur qu’un morceau de papier. Pour lui et pour lui seulement, brûler un livre, qu’il abhorre évidemment, puisqu’inculte et plein de ressentiment face à la culture, brûler un livre, donc, c’est aussi grave ou aussi peu grave que brûler un homme. Ceci posé, reste à comprendre pourquoi le consensus sur l’équivalence perdure et pourquoi de nombreux intellectuels continuent d’affirmer que brûler des livres ce serait comme brûler des Hommes, ou, plus exactement, que brûler des livres indiquerait une capacité à brûler ensuite des Hommes. Je ne vois pas d’autre explication que celle évoquée plus haut : pour eux, un livre est sacré. Ils croient en la “religion du livre”. Bien qu’écrivain, bien que passioné de littérature, bien que persuadé de l’immense importance de la culture livresque, je vous l’avoue : je veux bien qu’on brûle des livres, et même pour de très mauvaises raisons. On se sortira de ce massacre. Voir Farenheit 451. Mais à condition qu’on ne touche pas un seul cheveu de la tête d’aucun humain. Et si vous me répondez que l’un ne peut pas aller sans l’autre, je vous répondrai que vous m’avez sûrement mal lu ou bien que vous êtes.....


PS: Je ne peux pas laisser ces points de suspension sans explication, supputant que vous allez y mettre immédiatement le mot con. Ce n’est pas le sens induit. Ce que je voulais suggérer, c’est que vous êtes l’un, graine de dictateur, ou l’autre, religieusement attaché au livre.... Mais, ceci dit, votre élan premier était peut-être le bon.

vendredi 13 avril 2012

De plus en plus bêtes?

L’intelligence humaine serait sur le déclin.... Disons que l’intelligence moyenne, celle qu’on mesure par des tests, est en baisse. Je vous vois, bande de coquins.. Vous vous dites tout de suite : ah bah ! .. je confirme.. Qu’est-ce qu’ils sont cons, les autres!.... Le problème, c’est que c’est la moyenne qui baisse et que la moyenne, elle tient compte de vous aussi. Serait-on, donc, plus cons qu’avant? En voilà une bonne question, pas vrai?.... Admettons que ce soit vrai. Quelle pourrait en être la raison? L’éducation?.. C’est la première idée qui vient.. le niveau baisse, c’est bien connu... Et comme ça dure depuis longtemps, les parents étant eux-mêmes plus cons, leur progéniture serait victime de l’abêtissement général.... C’est une idée. La génétique?... Pourquoi pas?... Il se pourrait que l’espèce humaine soit déclinante, que nous soyons ce qu’on nomme une “fin de race”.... Beaucoup de gens pensent que l’avenir de l’Humain est relativement compromis.... Peut-être avons-nous entamé le déclin en commençant par la dégénérescence du cerveau. Autre idée, la mondialisation. Dans un sens le plus global envisageable. En élargissant le champ des connaissances possible, peut-être nous amène-t-elle à notre limite. Par exemple, en multipliant, à chaque instant, la quantité d’informations disponibles, peut-être nous contraint-elle à ne plus tout comprendre. Il y a également son aspect technologique. En particulier le numérique. Cet outil que nous avons ajouté à nos capacités, qui les multiplie quasiment à l’infini, peut-être nous impose-t-il un contact avec notre propre limite de réflexion, alors que, lui, ne semble pas en avoir. Mais on ne peut chercher les raisons de la baisse de l’intelligence moyenne mesurée sans mettre en cause l’instrument de mesure lui-même. Soit qu’il soit inadapté, soit qu’il soit mal étalonné. En gros, que le logiciel qu’il utilise soit faux. Malgré tout, je suis très amusé par cette nouvelle. Elle signifierait que l’Homme “augmenté” se retrouve, en fait, diminué. Elle confirmerait une idée qui trotte dans ma tête depuis des lustres. A mon avis, depuis l’invention de la bombe atomique, l’être humain est débordé par ce qu’il a créé. Aucun esprit, peu, très peu, en tous cas, ne peut s’enorgueillir de dominer encore la complexité de notre communauté humaine et, en tous cas, pas sous tous ses aspects. On est peut-être plus cons mais, de toute façon, l’intelligence moyenne ne peut y suffire.