Dieu est mort!... Certains ne retiennent de Nietzsche que cette phrase... Dieu est mort.. et de s’empresser d’ajouter, tout à fait logiquement: s’il est mort, c’est qu’il a existé.... Là, normalement, on clive gravement, comme on dit aujourd’hui. C’est imparable, pas vrai?.... S’il est mort, c’est qu’il fut.... Sauf qu’il ne s’agit ici que de sémantique. De l’application au langage d’une logique qui n’est que scientifique, mathématique. A entraîne B. Ce qui ne repose que sur un postulat: ce que les mathématiques conçoivent, le langage doit pouvoir le permettre. Parce que le langage est logique, évidemment logique. Et là, j’en suis désolé, je perds le fil.... C’est mathématique, si vous le désirez. Cela tient au concept de non-réciprocité. En maths: A implique B n’implique pas que B implique A. Le fait que le langage soit sommé de traduire une réalité scientifique n’implique pas que le langage soit la traduction d’une réalité. Pour ce qui nous (me?...) concerne ici: non, le fait que dieu soit mort n’implique pas qu’il ait existé. Cette conclusion n’est que l’effet d’une construction mentale à base de superposition, un effet de “couches”, si vous préférez. Ce que nous ne parvenons pas forcément à percevoir, c’est qu’il existe un saut de sens, de concept, entre l’affirmation primale: dieu est mort!.. et la réponse: c’est donc qu’il a existé.... Cette conclusion souffre d’insuffisance: ce ne sont que des mots. La réalité, du moins telle que je la conçois, est bien différente: dieu est mort, l’Homme l’a tué, mais ce que l’Homme a tué, ce n’est que l’idée d’un dieu. Ce qui est sur un autre niveau que la réalité, si vous suivez... Le fait que l’Homme ait tué son idée d’un dieu n’a rien à voir avec son existence ou non. Dieu existe ou pas, ce qui n’a rien à voir avec le fait que je croie ou non qu’il existe,qu’il ait existé, et que je sois parvenu ou non à le tuer. C’est objectivement un autre plan. Par contre, ce que je perçois, c’est que cela arrange bien les croyants, c’est à dire ceux qui sont convaincus de l’existence de dieu, qui vont même jusqu’à accepter qu’il ait pu, seulement, exister, et qu’il soit mort. Cela leur convient, donc, comme débat, pourvu qu’on accrédite l’existence actuelle ou passée d’un dieu, ils sont prêts à tout accepter.
La réalité, c’est que Nietzsche fait sans cesse appel à la philosophie préplatonicienne, celle qui conçoit l’univers sans notion de dieu quand nos penseurs actuels ne font appel qu’à Platon et Aristote, les deux tenants de l’existence d’une puissance supérieure à la base de toute vie. Conceptualiser Nietzsche dans un contexte platonicien ou aristotélicien et ne discourir que de la contestation de leur théorie, considérée comme fondatrice, par Nietzsche, suppose donc la contestation non de l’existence d’un dieu mais de sa survie.... Nous sommes donc largement manipulés en souscrivant à ce débat. Dieu peut très bien ne jamais avoir existé et être, pourtant, mort.... Mort dans la pensée humaine.... La philosophie actuelle, celle qu’on pourrait qualifier, dans le sillage d’un De Gaultier, d’officielle, se contente de discourir sur la base d’un dogme admis, celui de l’existence, actuelle ou passée, d’un être suprême, sans jamais envisager, à dessein, que le “créateur” ait pu ne jamais exister.. Ce qui les amène à accréditer l’hypothèse de sa mort, à la limite, la limite de leur système de pensée....
Dieu est mort, c’est certain, mais cela n’empêche en rien l’hypothèse selon laquelle il n’aurait jamais existé ailleurs que dans l’esprit des Hommes.
lundi 29 novembre 2010
dimanche 10 octobre 2010
Diogène..... et syndrome
Le syndrome de Diogène est un syndrome décrit par Clark en 1975 pour caractériser un trouble du comportement de la personne âgée conduisant à des conditions de vie négligées, voire insalubres, qui peut se traduire par une une syllogomanie (accumulation d’objets hétéroclites).
Il est très curieux de constater comment le comportement de Diogène a été interprété dans la définition du syndrome. Alors qu’il n’est qu’un ascète qu’on pourrait qualifier d’intégriste, de frénétique, qu’il a consacré sa vie à se débarrasser de tout ce qu’il trouvait inutile à la vie, jusqu’à son propre gobelet, brisé le jour où il vit un enfant boire à une fontaine en usant de ses mains en creux, curieux, donc, d’en arriver, partant de ce philosophe cynique, qui parcourait les rue de sa cité à la recherche “d’un homme”, à une image dégradée de la personne négligeant totalement son hygiène. D’un point de vue logique, vivre dans le dénuement n’a rien à voir avec vivre dans la fange. A moins d’ajouter l’hypothèse d’un jugement moral à la démarche conduisant à cette dérive. A cela, à mon sens, trois types de raisons: d’abord, l’association, toujours vivace, dans les milieux bourgeois, entre saleté et pauvreté, mais qui nous viendrait plutôt du temps des mines, du dix neuvième siècle. Ensuite, le fait que Diogène n’était du tout le copain d’un certain Platon. La tradition nous rapporte un grand nombre d’apostrophes sauvages du cynique contre l’inspirateur de la religion. Diogène était athée. Les philosophes athées n’ont jamais eu très bonne presse, encore plus lorsqu’ils précèdent de plus de quatre cents ans l’arrivée du messie. La morale commune accepte de comprendre l’athéisme comme une évolution de l’esprit humain qui, s’adossant sur les progrès de la connaissance, ferait reculer l’idée d’un dieu sur son nuage vers des conceptions plus abstraites. L’athéisme n’est admis que s’il suit l’apparition “du” livre. Mais le concevoir comme une vision de l’univers plus ancienne même que la religion, presque plus légitime, puisque, en matière de religion, l’argument de la tradition est essentiel, cela, c’est au-delà des forces mentales des croyants. Diogène, par son cynisme athée, par son comportement immoral, du moins pour les gens pieux, est plus qu’un monstre: un ennemi. D’où une certaine rancoeur envers lui et quelques autres, dont Socrate, Lucien de Samosate, j’en passe, qui sont voués au gémonies comme l’est encore, par exemple, Nietzsche. On comprend alors que l’associer à la déchéance, comme d’autres au nazisme, par exemple, est une manière de continuité dans la logique excommunicatoire de l’église. Le pape actuel vient de dire exactement la même chose du vingtième siècle athée. Le troisième type de raison qu’on pourrait invoquer pour expliquer ce jugement diffamatoire sur Diogène tient à notre type de société: le libéralisme. Dans les temps actuels, l’ascèse, quand tout est fait pour que nous consommions, devient également le fait non seulement d’originaux un peu cinglés mais, bien pire, la seule attitude capable de mettre le système à bas. L’ennemi, celui qu’on doit abattre ou, à défaut, salir.
Il n’y a donc rien d’étonnant à ce que Diogène, ennemi de la pensée actuelle à plusieurs titres, ennemi de la pensée majoritaire, au sens propre, se trouve associé à la saleté et à l’ordure. Ce qu’on appelle une leçon de tolérance.
Il est très curieux de constater comment le comportement de Diogène a été interprété dans la définition du syndrome. Alors qu’il n’est qu’un ascète qu’on pourrait qualifier d’intégriste, de frénétique, qu’il a consacré sa vie à se débarrasser de tout ce qu’il trouvait inutile à la vie, jusqu’à son propre gobelet, brisé le jour où il vit un enfant boire à une fontaine en usant de ses mains en creux, curieux, donc, d’en arriver, partant de ce philosophe cynique, qui parcourait les rue de sa cité à la recherche “d’un homme”, à une image dégradée de la personne négligeant totalement son hygiène. D’un point de vue logique, vivre dans le dénuement n’a rien à voir avec vivre dans la fange. A moins d’ajouter l’hypothèse d’un jugement moral à la démarche conduisant à cette dérive. A cela, à mon sens, trois types de raisons: d’abord, l’association, toujours vivace, dans les milieux bourgeois, entre saleté et pauvreté, mais qui nous viendrait plutôt du temps des mines, du dix neuvième siècle. Ensuite, le fait que Diogène n’était du tout le copain d’un certain Platon. La tradition nous rapporte un grand nombre d’apostrophes sauvages du cynique contre l’inspirateur de la religion. Diogène était athée. Les philosophes athées n’ont jamais eu très bonne presse, encore plus lorsqu’ils précèdent de plus de quatre cents ans l’arrivée du messie. La morale commune accepte de comprendre l’athéisme comme une évolution de l’esprit humain qui, s’adossant sur les progrès de la connaissance, ferait reculer l’idée d’un dieu sur son nuage vers des conceptions plus abstraites. L’athéisme n’est admis que s’il suit l’apparition “du” livre. Mais le concevoir comme une vision de l’univers plus ancienne même que la religion, presque plus légitime, puisque, en matière de religion, l’argument de la tradition est essentiel, cela, c’est au-delà des forces mentales des croyants. Diogène, par son cynisme athée, par son comportement immoral, du moins pour les gens pieux, est plus qu’un monstre: un ennemi. D’où une certaine rancoeur envers lui et quelques autres, dont Socrate, Lucien de Samosate, j’en passe, qui sont voués au gémonies comme l’est encore, par exemple, Nietzsche. On comprend alors que l’associer à la déchéance, comme d’autres au nazisme, par exemple, est une manière de continuité dans la logique excommunicatoire de l’église. Le pape actuel vient de dire exactement la même chose du vingtième siècle athée. Le troisième type de raison qu’on pourrait invoquer pour expliquer ce jugement diffamatoire sur Diogène tient à notre type de société: le libéralisme. Dans les temps actuels, l’ascèse, quand tout est fait pour que nous consommions, devient également le fait non seulement d’originaux un peu cinglés mais, bien pire, la seule attitude capable de mettre le système à bas. L’ennemi, celui qu’on doit abattre ou, à défaut, salir.
Il n’y a donc rien d’étonnant à ce que Diogène, ennemi de la pensée actuelle à plusieurs titres, ennemi de la pensée majoritaire, au sens propre, se trouve associé à la saleté et à l’ordure. Ce qu’on appelle une leçon de tolérance.
mardi 22 juin 2010
Histoire.... grand H?....
Parfois, il semble absolument évident que la “culture” scientifique est porteuse d’une immense richesse pour ce qui concerne le domaine philosophique. D’ailleurs, point n’est besoin de s’appesantir. Tous les philosophes antiques étaient également des savants, Pascal, Einstein, Heisenberg, Albert Jacquart ou Hubert Reeves aujourd’hui sont des exemples assez démonstratifs. Il est un débat actuel dont il me semble qu’il gagnerait à s’inspirer des théories scientifiques, c’est celui qui concerne l’Histoire. L’histoire avec un grand H existe-t-elle? Est-elle autre chose que la juxtaposition pas toujours logique ou pleine de sens de destins individuels?.... Le seconde guerre mondiale, la révolution française, peuvent-elles être décrites plutôt d’un point de vue global ou bien n’en avons-nous une idée précise et juste qu’en portant un regard focalisé sur le rôle de chacun des acteurs?
Dans ce cas, il me semble que la mécanique des fluides est de quelque utilité. En particulier l’écoulement d’un fluide dans un tuyau. Ce que vous pouvez constater, d’un point de vue macroscopique c’est que l’eau coule de votre robinet avec un débit constant de quelques litres par minute. C’est ce qui vous est utile lorsque vous remplissez un récipient ou une baignoire ou bien que vous arrosez votre pelouse. SI vous observez le phénomène d’un point de vue microscopique, par contre, vous tombez sur une complexité sans nom. Si l’observation globale pouvait inciter à penser que toutes les molécules se déplaceraient à la vitesse du flux et toutes dans le même sens, en réalité, aucune molécule n’a le même mouvement que sa voisine. Certaines dans le sens du flux, mais plus rapidement ou plus lentement, certaines à contre-courant, certaine perpendiculairement au sens du courant, d’autres immobiles, bref, un fatras indescriptible. A tel point, par exemple, que si vous versez de l’eau pure et incolore dans un récipient ne contenant de l’eau colorée en bleu, vous aurez la surprise de voir que le réservoir du haut se colore peu à peu en bleu, ce qui signifie que certaines molécules ont remonté le filet d’eau qui s’écoule. Et, ce, en nombre suffisamment significatif pour provoquer une coloration de l’eau située en haut. Bref, décrire le mouvement macroscopique, un écoulement régulier, en prenant pour base d’observation l’échelle de la molécule devient impossible. Car très peu parmi elles suivent le mouvement global constaté. Pourtant, ce mouvement global, est la réalité: de l’eau s’écoule d’un point à un autre. Pour recréer la réalité constatée à partir de chacune des molécules, il faut connaître avec précision le mouvement de chacune d’elles et déduire de la somme de tous ces mouvements le résultat total. C’est un calcul quasiment impossible. On ne peut le mener à bien qu’en faisant appel aux probabilités. C’est une des questions théoriques les plus complexes de la physique. Un cauchemar pour le physicien. Pourtant, la réalité est impérative: le liquide circule d’un point à un autre. Mais elle est double. D’un point de vue général, cela s’écoule, d’un point de vue particulier, rien ne l’indique. Pour décrire la réalité, donc, nous avons besoin des deux échelles. La réalité est constituée à la fois du global et du particulier.
De la même manière, me semble-t-il, le terme “histoire” recouvre deux réalités. L’une générale, l’autre individuelle. Pour prendre un exemple, disons que, d’un point de vue global, l’Allemagne hitlérienne a mené une guerre au reste de l’Europe entre 39 et 45, que, pendant cette guerre, elle s’est livrée à la déportation et l’élimination d’environ 6 millions de juifs. Cela ne dit rien sur l’histoire particulière de chacun des juifs qui ont subi ce sort. Si nous observons l’histoire au niveau individuel, nous trouvons toutes sortes de comportements. La fuite, le suicide, la collaboration (il y eut des juifs collaborateurs...), l’évasion, la survie au camp, la mort silencieuse, l’accueil dans des familles de “justes”, et, bien entendu, la déportation, bref, des millions de cas différents dont très peu décrivent la réalité globale: l’extermination de six millions d’individus. De plus, l’existence de la “solution finale”, que l’on peut comparer à un “flux global”, impose à chacun des individus concernés une attitude qui sera leur réponse personnelle à ce flux. Ils vont devoir soit marcher dans le sens du flux, soit le remonter, soir s’en échapper par un biais mais, en tous cas, ils devront se déterminer par rapport à lui. Il y a très peu de chances de pouvoir décrire ce que fut la solution finale à partir de tous les cas particuliers. Cela supposerait, d’ailleurs, qu’on les connaisse tous. La réalité globale ne pourra être parfaitement décrite à partir des cas particuliers. Pourtant, ces cas particuliers existent. Comme existe la réalité globale. Ainsi, il me semble que le débat actuel sur Histoire et histoire n’en est pas un. Pour comprendre la réalité d’un fait historique, nous avons besoin des deux points de vue.
Il est assez évident que notre époque, qui privilégie l’individu en tant qu’unique ne peut facilement admettre que nous serions parfois les jouets d’un courant dont la puissance nous dépasse. Aujourd’hui, il semble très important que chacun d’entre nous puisse penser qu’il tient son destin entre ses mains et qu’il en est le seul maître. Cette idée, qui tend à nier l’existence d’une histoire avec un grand H est évidemment très rentable d’un point de vue économique. Faut-il voir là la raison de cet air du temps qui voudrait qu’on en revienne toujours et sans cesse aux cas particuliers?.....
Dans ce cas, il me semble que la mécanique des fluides est de quelque utilité. En particulier l’écoulement d’un fluide dans un tuyau. Ce que vous pouvez constater, d’un point de vue macroscopique c’est que l’eau coule de votre robinet avec un débit constant de quelques litres par minute. C’est ce qui vous est utile lorsque vous remplissez un récipient ou une baignoire ou bien que vous arrosez votre pelouse. SI vous observez le phénomène d’un point de vue microscopique, par contre, vous tombez sur une complexité sans nom. Si l’observation globale pouvait inciter à penser que toutes les molécules se déplaceraient à la vitesse du flux et toutes dans le même sens, en réalité, aucune molécule n’a le même mouvement que sa voisine. Certaines dans le sens du flux, mais plus rapidement ou plus lentement, certaines à contre-courant, certaine perpendiculairement au sens du courant, d’autres immobiles, bref, un fatras indescriptible. A tel point, par exemple, que si vous versez de l’eau pure et incolore dans un récipient ne contenant de l’eau colorée en bleu, vous aurez la surprise de voir que le réservoir du haut se colore peu à peu en bleu, ce qui signifie que certaines molécules ont remonté le filet d’eau qui s’écoule. Et, ce, en nombre suffisamment significatif pour provoquer une coloration de l’eau située en haut. Bref, décrire le mouvement macroscopique, un écoulement régulier, en prenant pour base d’observation l’échelle de la molécule devient impossible. Car très peu parmi elles suivent le mouvement global constaté. Pourtant, ce mouvement global, est la réalité: de l’eau s’écoule d’un point à un autre. Pour recréer la réalité constatée à partir de chacune des molécules, il faut connaître avec précision le mouvement de chacune d’elles et déduire de la somme de tous ces mouvements le résultat total. C’est un calcul quasiment impossible. On ne peut le mener à bien qu’en faisant appel aux probabilités. C’est une des questions théoriques les plus complexes de la physique. Un cauchemar pour le physicien. Pourtant, la réalité est impérative: le liquide circule d’un point à un autre. Mais elle est double. D’un point de vue général, cela s’écoule, d’un point de vue particulier, rien ne l’indique. Pour décrire la réalité, donc, nous avons besoin des deux échelles. La réalité est constituée à la fois du global et du particulier.
De la même manière, me semble-t-il, le terme “histoire” recouvre deux réalités. L’une générale, l’autre individuelle. Pour prendre un exemple, disons que, d’un point de vue global, l’Allemagne hitlérienne a mené une guerre au reste de l’Europe entre 39 et 45, que, pendant cette guerre, elle s’est livrée à la déportation et l’élimination d’environ 6 millions de juifs. Cela ne dit rien sur l’histoire particulière de chacun des juifs qui ont subi ce sort. Si nous observons l’histoire au niveau individuel, nous trouvons toutes sortes de comportements. La fuite, le suicide, la collaboration (il y eut des juifs collaborateurs...), l’évasion, la survie au camp, la mort silencieuse, l’accueil dans des familles de “justes”, et, bien entendu, la déportation, bref, des millions de cas différents dont très peu décrivent la réalité globale: l’extermination de six millions d’individus. De plus, l’existence de la “solution finale”, que l’on peut comparer à un “flux global”, impose à chacun des individus concernés une attitude qui sera leur réponse personnelle à ce flux. Ils vont devoir soit marcher dans le sens du flux, soit le remonter, soir s’en échapper par un biais mais, en tous cas, ils devront se déterminer par rapport à lui. Il y a très peu de chances de pouvoir décrire ce que fut la solution finale à partir de tous les cas particuliers. Cela supposerait, d’ailleurs, qu’on les connaisse tous. La réalité globale ne pourra être parfaitement décrite à partir des cas particuliers. Pourtant, ces cas particuliers existent. Comme existe la réalité globale. Ainsi, il me semble que le débat actuel sur Histoire et histoire n’en est pas un. Pour comprendre la réalité d’un fait historique, nous avons besoin des deux points de vue.
Il est assez évident que notre époque, qui privilégie l’individu en tant qu’unique ne peut facilement admettre que nous serions parfois les jouets d’un courant dont la puissance nous dépasse. Aujourd’hui, il semble très important que chacun d’entre nous puisse penser qu’il tient son destin entre ses mains et qu’il en est le seul maître. Cette idée, qui tend à nier l’existence d’une histoire avec un grand H est évidemment très rentable d’un point de vue économique. Faut-il voir là la raison de cet air du temps qui voudrait qu’on en revienne toujours et sans cesse aux cas particuliers?.....
vendredi 18 juin 2010
Invitation à penser autrement
Le génie pourrait se définir par l’incapacité à justifier ses raisonnements. L’action sous l’impulsion de l’instinct. Ce qui suppose donc une appréhension globale des tenants et aboutissants, une perception intégrale du contexte, basées uniquement sur une sensation, un ressenti, qui ne laisse aucune place à la logique. Le génie est celui qui pressent sans pouvoir expliquer ce qu’il a ressenti. Qui ne peut donc édicter ni théorie, ni théorème, ni principe, ni dogme. Ainsi sont les choses. Pour donner tort ou raison au génie, il n’y a qu’un moyen: attendre que le temps, l’histoire, lui donne ou non raison. Ce qui exclut d’emblée du génie tous les penseurs, aussi puissants soient-ils, qui peuvent étayer leur raisonnement. Pour prendre des cas concrets, parlons de Nietzsche, en philosophie, qui ne se comprend pas au sens de l’entendement, mais se reçoit ou non, par opposition à Kant ou Sartre, qui s’expliquent. Parlons de Einstein, qui a une intuition de l’ordre du monde physique, par opposition à Newton qui l’explique. De tel ou tel peintre, qui “conceptualise” par rapport à Van Gogh, qui produit. De tel ou tel littérateur qui s’inscrit dans un courant, une filiation, en opposition à Artaud, par exemple, qui vomit ses mots. De Mozart, qui éructe sa musique par opposition à Beethoven, Bach ou Wagner qui la construisent. Le génie est perturbateur parce qu’il ‘entre pas dans le champs de la raison dialectique, qu’il ne peut se concevoir que comme étant ou non sans autre débat. Ce qu’il produit est ou n’est pas. Mais le pire, la partie la plus opposée au génie, c’est évidemment celle qui cherche la raison de toute chose. Qui dissèque et disserte ce qui ne peut s’expliquer autrement que par la célèbre formule: cela est!.... Le génie humain n’a pas de pire ennemi que qui veut à tout prix comprendre et analyser. Nos cimetières sont pleins de ces génies anonymes qui ont croulé sous l’injonction de s’expliquer quand le fait même de leur génie est de ne pas le pouvoir. Pas de pire ennemi que les fonctionnaires de la pensée qui, manches de lustrines au poignet, dissèquent et analysent pour comprendre et trouver une cohérence.
Sans vouloir insister outre mesure, je signalerai à ceux que cela intéresse que la définition du génie ainsi acceptée en appelle à la notion de surdon, qui peut exactement se définir ainsi: incompréhensible et injustifiable. Tous ceux qui s’intéressent à cette question, hélas assez rares, il n’est qu’à constater le peu d’intérêt que suscite cette manière d’être dans l’intelligentsia, le nombre très réduit de publications, tous ceux, donc, qui ont un jour été confrontés à la très spéciale notion de surdon, savent qu’il y a une espèce de superposition possible entre le calque du génie et celui du surdon.
Sans vouloir insister outre mesure, je signalerai à ceux que cela intéresse que la définition du génie ainsi acceptée en appelle à la notion de surdon, qui peut exactement se définir ainsi: incompréhensible et injustifiable. Tous ceux qui s’intéressent à cette question, hélas assez rares, il n’est qu’à constater le peu d’intérêt que suscite cette manière d’être dans l’intelligentsia, le nombre très réduit de publications, tous ceux, donc, qui ont un jour été confrontés à la très spéciale notion de surdon, savent qu’il y a une espèce de superposition possible entre le calque du génie et celui du surdon.
lundi 3 mai 2010
Tentative de penser le cas Polanski..... au delà du bout du nez
Il est bien difficile de se prononcer sur le cas Polanski... Sa défense est loin de n’être qu’adroite.... Ses détracteurs ressortent bien souvent de la bien-pensance, voire de l’obscurantisme, ses amis sont souvent excessifs dans le maniement de la notion de complot. Il reste une chose. Cet homme a eu, en 1977, des relations sexuelles avec une mineure de 13 ans dont le consentement, au moment des faits, semble mis en doute, et dans un pays où le crime de viol ne connaît pas de prescription, ce qui est une bonne chose, pour des raisons évoquées plus bas. A cette époque, une période d’extrême liberté sexuelle touchant à la confusion, de telles relations ne sont pas, en soi, choquantes. Ce qui l’est , c’est le doute sur le consentement. Parce que, même en ces temps troublés des années 70, le crime de viol existe. Il reste donc à établir s’il y eut ou non viol. La victime, Samantha Geimer, demande aujourd’hui, elle-même, l’abandon des poursuites. Pour autant, elle ne nie pas le fait qu’elle fut violentée. Peut-on la croire? Toute personne qui a un jour été en contact avec une femme violée sait parfaitement que la culpabilité ressentie, la mémoire traumatique, peuvent aboutir à des dizaines d’années de déni. Trente trois ans, ce n’est pas un délai très long au regard de ces attitudes. En France, le crime de viol est prescrit après dix ans, vingt si la victime était mineure au moment des faits, parfois plus si le violeur avait autorité sur la victime, membre de la famille, enseignant, animateur, etc.... Cette prescription a pour effet que la majorité des cas de viol ne sont jamais traités par la justice. En ce sens, il me semble que la justice états-unienne est plus juste que la nôtre. J’ai connu des femmes qui, avant de parler de leur traumatisme, ont attendu d’être sur leur lit de mort, comme si seul ce moment, où l’on sait qu’on ne devra pas assumer les conséquences de ses révélations, pouvait s’envisager pour remettre en cause l’image d’un père, d’un oncle, d’un frère. La parole d’une femme violée n’est pas libre. Sa vie est une épreuve, une mascarade, elle souffre, ne serait-ce que de ses relations sexuelles tragiques, voire douloureuses, ne serait-ce qu’à cause de ce qu’elle craint de transmettre à ses enfants de cette souffrance, ne serait-ce qu’à cause de l’ambiguïté qu’elle entretient, que, parfois, son entourage proche entretient, sur sa culpabilité: la plupart du temps, ces femmes sont convaincues qu’elles ont voulu, recherché, trouvé avantage à leur viol. Quand elles ne pensent pas qu’elles sont seules responsables de leur drame. La vie d’une femme violée est entièrement conditionnée par cet acte. Une vie!.. C’est bien plus que 33 ans. Et je réaffirme que Mme Samantha Geimer peut très bien être, aujourd’hui encore, dans sa démarche difficile d’outing.. Et, donc, ne pas vouloir poursuivre parce que la douleur de la révélation est encore trop prégnante. En face de cela, Polanski dit “avoir payé sa dette” en ayant subi 42 jours de prison.... 42 jours.... Pour quiconque a été violé ou a connu des femmes violées, cette affirmation est tout simplement odieuse. Elle démontre tout simplement que Polanski, comme beaucoup d’hommes, et particulièrement parmi ceux qui prennent sa défense de manière inconditionnelle, n’ont toujours pas compris en quoi le viol est un crime. En face de ces 42 jours, une femme peut aligner 33 ans de torture. Pour moi, c’est un bien que Mr Polanski ait à répondre des sa “bêtise” commise il y a 33 ans. “Bêtise”, parce que, encore une fois, ces faits ne se sont pas produits n’importe quand.. on peut lui accorder les circonstances atténuantes dûes à cette époque. Mais il ne me paraît pas injuste qu’il réponde devant la justice, fut-ce 33 ans après. Ne serait-ce qu’au titre du symbole: celui qui consisterait à dire aux femmes violées de par le monde qu’il n’est jamais trop tard pour obtenir justice sur des faits aussi graves.
vendredi 26 mars 2010
Et merde!....
Ben, tiens!... V’là aut’chose... Après une semaine Platon, puis une semaine Aristote, les deux références honnies de tout athée qui se respecte, France-cul (la mal nommée) nous a fait sa semaine du “bonheur”.... En relation avec l’Université de Rennes... Pour finir, apothéose, voilà que débarquent, vendredi, Spinoza et Kant.... Et, là, je cale... Non, je ne vais pas tomber dans ce piège grossier.... Tiens, pour une fois, vous savez quoi, je vais la remettre dans ma culotte... Je ne vais pas réagir.. Rien à faire, vous ne m’aurez pas, tas d’encul-tur-és normés, normatifs et normaliens, cette fois, c’est non.. Allez vous faire voir.... Je ne répondrai pas sur votre tendance à ne considérer que les philosophes croyants, je ne démonterai pas Kant, et, en particulier, son texte cité aujourd’hui, qui n’a rien à voir avec la modernité, malgré ce que vous en annoncez, ce qui paraît pourtant facile, je ne parlerai pas de Spinoza, qui n’a jamais créé en moi aucun désir, rien à faire, cette fois, vous allez aller vous faire foutre..... Je ne vous écouterai plus qu’avec un sourire narquois, parce que, comme toute personne appelée à s’exprimer, vous avez fini, ce jour, de montrer vos limites, en tous cas pour moi.... Et, même si j’en suis conscient, mêmes si je sais que cette protestation ne concerna presque que moi, cette fois, c’est fini, je vous conchie....
samedi 13 mars 2010
Socrate, Platon, Nietzsche et France-Cul....
France-Cul, décidément.... Semaine Platon.... Semaine au cours de laquelle il ne sera question, presque exclusivement, que de Socrate... Une ambiguïté absolue.. Platon a laissé trace.. Socrate aucune... Sauf ce qu’en a transcrit Platon.... Si vous êtes ici, je suppose que vous savez que Platon est l’une des bêtes noires de F. Nietzsche, en particulier, et de beaucoup de philosophes.... Parce qu’on lui doit, c’est absolument sans conteste, l’invention de la religion et du concept de l’immortalité de l’âme... Le point sur lequel il convient ici d’insister c’est qu’on ne saura jamais ce que fut la pensée de Socrate.... Jamais!... Parce qu’il n’a jamais pris la peine de nous laisser aucune trace... Ce qui me paraît être la marque de la sagesse absolue.... Dans notre monde, l’actuel, une telle attitude est absolument incompréhensible... Imaginez tous les gens dont on parle et tâchez de me trouver un seul d’entre eux qui ne désirerait pas, à aucun prix, laisser une trace.. La réponse est péremptoire: aucun!... Moi compris.... Cette attitude est tout simplement hors du champs de compréhension. Ni mal, ni bien, ( je n’ai pas osé le “par-delà”...) ailleurs... Ce qui me donne envie de rire, c’est l’encombrement qui émane de la série d’émissions de France-Cul qui ne sait à aucun moment faire le départ entre la parole de Platon, qui est le responsable, et celle de Socrate, qui n’est responsable que d’avoir parlé... Toute personne un tantinet dubitative a pu remarquer que, de nos jours, la différence entre ce que disent nos élites et ce qu’en transcrit la Presse n’a absolument aucun rapport.... Pourtant, cette émission, dirigée par R. Enthoven, l’un des ex, cette émission, donc, a commencé par l’affirmation, non étayée, que Socrate serait lui-même l’inventeur du concept d’immortalité de l’âme... Ce qui est une pure hérésie philosophique.. et ce qui n’empêche pas que cette idée soit colportée dans les esprits de ceux qui écoutent cette radio, c’est à dire ceux qui ne pensent qu’à laisser trace, à vous dominer, à vous mépriser parce qu’ils ont la culture idoine, la bouée qui permet de surnager dans le monde violent qu’ils ont créé et qui ne repose que sur un critère: la trace que vous allez laisser.... Maintenir cette confusion, peut-être volontairement, du moins en assumant ce mensonge par omission, c’est un pur scandale!... Loin des profits des patrons voyous, du CAC 40, de l’héritage, des banques, de nos problèmes quotidiens, me direz-vous... Et bien c’est pourtant par là que ces Messieurs et Dames vous la mettent profond, très profond.... France-Cul (la mal nommée) est une radio catho.... Tout ce qui peut accréditer l’hypothèse d’un dieu lui est plaisant.. La pensée de notre pays, la France, celle des Lumières, de la laïcité, de l’anticléricalisme républicain, ce pays voit sa pensée dominée par une “école” déiste qui a pour nom ENS... La religion n’a pas, en France, de meilleur allié que la rue d’Ulm.... Une preuve, par exemple, une émission, que vous pouvez vous-même réécouter, ce qui fait une énorme différence d’avec la parole de Socrate, sur leur site: on y entend Derrida, intellectuel d’origine juive et proche de l’extrême gauche, avouer, à quelques jours de sa mort, qu’il se révèle être un très mauvais élève de la philosophie, considérée comme l’apprentissage de la mort... et sa non envie de disparaître, ses doutes au seuil du tombeau, son désir de foi... Est-il moyen plus pervers de dénaturer son oeuvre anti-déiste que de nous faire croire que, à quelques jours de l’échéance, Derrida, tel un vulgaire Voltaire, aura, finalement, hésité sur la croyance en un au-delà? Quel est le propos? Quel est le but poursuivi si ce n’est de nous donner à penser que, tant qu’on n’a pas réellement compris la tragédie que représente notre mortalité, qu’on n’en a pas peur, on ne dit rien de sérieux? De nous faire comprendre, tout à fait insidieusement que le vainqueur devant le temps, c’est bien Platon et non Socrate.. De s’inscrire, une fois pour toutes contre Nietzsche et la non-existence de dieu?
La question que pose, en arrière-fonds, cette émission, est une question typiquement socrato-platonicienne, qui, d’ailleurs, fut reprise, un jour, par un certain Coluche, à qui l’on reprochait sa participation à des émissions ”grand-public” et dont la réponse, à la fois candide et pertinente, fut: vous préférez m’y voir, moi, ou bien tous les cons qui n’attendent que ça? En résumé, devons-nous, nous-autres, qui avons à dire, renoncer à nous exprimer parce que nous jugerions que notre parole n’est d’aucune valeur par rapport au silence (antienne) ou bien occuper l’espace médiatique à la place de tous les cons qui ne pensent qu’à l’occuper?.. Je vais vous laisser un temps....
La solution à ces problèmes insolubles pourrait tenir en une locution absolument incompréhensible pour le commun des mortels: le surdon. C’est un mal dont je suis atteint. Il m’est absolument évident que Socrate est “surdoué” alors que Platon n’est qu’intelligent.... L’intelligence, au sens où nous la définissons aujourd'hui, mais également au sens où elle a toujours été définie au cours des siècles passés, est toujours considérée comme supérieure au “surdon”, qui est, j’y insiste, un trouble de la pensée, une maladie orpheline, une tare.... Dans tous les cas, l’intelligence a vaincu le “surdon”, simplement parce qu’elle est accessible, imitable, copiable, qu’on peut la singer, s’en vanter, la feindre, à condition d’être né où il faut et d’avoir fréquenté la bonne école... La seule différence entre Platon, très cultivé, intelligent, vif, mais aussi tueur, péremptoire, vainqueur, et Socrate, c’est le surdon, le mal nommé. Je suis absolument certain que Nietzsche, par exemple, était “surdoué”, ce qui le condamne, à jamais, tel Socrate, à l’isolement.....
La question que pose, en arrière-fonds, cette émission, est une question typiquement socrato-platonicienne, qui, d’ailleurs, fut reprise, un jour, par un certain Coluche, à qui l’on reprochait sa participation à des émissions ”grand-public” et dont la réponse, à la fois candide et pertinente, fut: vous préférez m’y voir, moi, ou bien tous les cons qui n’attendent que ça? En résumé, devons-nous, nous-autres, qui avons à dire, renoncer à nous exprimer parce que nous jugerions que notre parole n’est d’aucune valeur par rapport au silence (antienne) ou bien occuper l’espace médiatique à la place de tous les cons qui ne pensent qu’à l’occuper?.. Je vais vous laisser un temps....
La solution à ces problèmes insolubles pourrait tenir en une locution absolument incompréhensible pour le commun des mortels: le surdon. C’est un mal dont je suis atteint. Il m’est absolument évident que Socrate est “surdoué” alors que Platon n’est qu’intelligent.... L’intelligence, au sens où nous la définissons aujourd'hui, mais également au sens où elle a toujours été définie au cours des siècles passés, est toujours considérée comme supérieure au “surdon”, qui est, j’y insiste, un trouble de la pensée, une maladie orpheline, une tare.... Dans tous les cas, l’intelligence a vaincu le “surdon”, simplement parce qu’elle est accessible, imitable, copiable, qu’on peut la singer, s’en vanter, la feindre, à condition d’être né où il faut et d’avoir fréquenté la bonne école... La seule différence entre Platon, très cultivé, intelligent, vif, mais aussi tueur, péremptoire, vainqueur, et Socrate, c’est le surdon, le mal nommé. Je suis absolument certain que Nietzsche, par exemple, était “surdoué”, ce qui le condamne, à jamais, tel Socrate, à l’isolement.....
lundi 15 février 2010
L'incertitude de Heisenberg
La vache!.. Un moment, j’ai eu peur... J’étais au clavier, là, as usual, et c’était l’heure de la philo, sur France-cul, et là!.... Badablang!... Hume, scepticisme (prononcez “skeptissizem”...) , Schrödinger, Heisenberg, l’incertitude, le doute, la physique quantique.... Tout à coup, j’avoue, j’ai chancelé.... Ach!.. Le doute!.... N’aurais-je pas tout à fait compris?.... Il m’a fallu une demi-heure.... Et trente minutes, dans la vie d’un type comme moi, c’est absolument terrible!.... Il faut que je vous avoue une tare irrémédiable: je suis un scientifique..... Et pas un amateur, hein, un estampillé.... Bac plus cinq.... Et, conséquence mais autre tare insurmontable, je suis passé à la littérature par le biais du livre d’un physicien, W. Heisenberg, qui a pour titre: physique et philosophie. Heisenberg, c’est l’inventeur du principe d’incertitude..... Comme vous n’êtes pas forcément scientifiques vous-mêmes, je vous explique ce qu’est un principe: un “truc machin” qui s’applique et que l’on n’est pas, pour l’instant, capable d’expliquer. Celui d’Archimède est célèbre... Il y eût un long temps celui de Fermat mais un petit génie a réussi, celui-là, à le démontrer.... Ce qui n’est pas rien!.. Mais démontrer que les principes, au sens mathématique, des fois, ça décrit la réalité n’est pas une nécessité absolue... La seule chose qui manque, c’est la démonstration.... Mais les principes, en général, eux, décrivent la réalité, avec ou sans... Je suis donc absolument désolé d’avouer ici que ma pensée repose sur un principe... ce qui signifie que j’espère que, quelque jour, il sera enfin démontré... Ce qui est une tare, j’en conviens.. Et, je m’en excuse, je suis donc comme tout le monde: j’ai des certitudes..... Cela avoué, on pourrait causer de la nature des certitudes de chacun.. Là, je sens qu’on va se fâcher... Et, donc, voilà que France-cul attaque au marteau-piqueur ma certitude fondatrice: le principe d’incertitude de W. Heisenberg. Tout est passible de remise en cause, vous dites? Ben, évidemment, c’est d’ailleurs pour ça que j’en suis bouleversiffié... Je pourrais vous parler de votre propre capacité à vous remettre en cause.... Ce ne serait pas triste... Mais ce ne serait qu’une défense.... Une justification....
Au bout d’une demi-heure, je me suis rendu compte que les invités de l’émission étaient tous des littéraires. Alors vous allez me dire que je me suis raccroché à mes branches... Ces foutus littéraires n’y connaissent rien en sciences et c’est donc normal, pour moi, qu’ils paraissent à côté de la plaque... Et vous aurez raison... Sauf que, si vous me lisez, vous savez que je viens de mettre le doigt sur un problème que j’ai déjà soulevé: le manque de culture scientifique qui concerne, par exemple, un homme comme Camus, qui ne conclut à “l’absurde”, à mon sens, que parce qu’il manque cruellement du recul que pourrait lui donner une culture scientifique dans sa conception de l’univers. En gros, ce n’est pas parce qu’on ne comprend pas qu’il n’y a rien à comprendre.... C’est, pour le moins, un peu court.... Autrement dit : ce n’est pas parce qu’on ne trouve pas de sens à l’organisation de la matière qu’il n’y a pas de sens à l’organisation de la matière.. Mais c’est encore assez faible, comme vertige... Parce que, lorsqu’on jouit d’une éducation scientifique rigoureuse, ce dont on s’aperçoit, à terme, c’est que l’absence de sens n’est pas en soi un problème. Mieux!, que c’est la recherche de sens qui interdit de trouver un sens éventuel.... Parce que toute quête de sens est obligatoirement une réduction du champs du possible.... Pour moi, cette constatation repose sur la lecture du livre de W. Heisenberg. Je suppose qu’il existe d’autres chemins pour en arriver à ce point. Mais ce qui est essentiel dans les considérations philosophiques de Heisenberg, c’est qu’il existe des limites intangibles à notre quête de savoir, à la recherche de sens. En énonçant qu’on ne peut, mathématiquement, pas connaître à la fois la position et la vitesse d’une particule, Heisenberg pose un jalon, sème un caillou, qui nous dit une chose: on ne peut pas tout savoir. En d’autres termes: la science a ses propres limites et ne pourra pas percer tous les mystères de la matière, de la vie, de l’univers.... A partir de lui, on sait que c’est impossible.... La géométrie, me disait un maître d’école de mon enfance, c’est l’art de raisonner vrai sur des figures fausses... Et peu m’importe, en vérité, de savoir si Heisenberg a ou non découvert un vrai principe, démontrable ou non. Il a levé un coin du voile sur notre devenir: depuis lui, on sait qu’il existe, qu’il pourrait exister, des choses, des phénomènes, qu’on n’expliquera jamais. Il a fixé une borne à la connaissance. Un putain de pavé dans la mare de tous ceux qui croient que le progrès peut mener toujours plus loin. D’un point de vue littéraire ou bien psychologique, ce genre d’affirmation génère logiquement une protestation évidente: la première limite au savoir de l’Homme, c’est bien entendu l’Homme lui-même. Ce qu’il trouve dépend entièrement de ce qu’il cherche.... Mais aussi des moyens qu’il se donne pour le rechercher. En particulier de sa capacité à remettre en cause ses propres certitudes. C’est d’une logique imparable. Si j’admets que la connaissance pourrait avoir des limites, c’est qu’il m’est favorable d’admettre que la connaissance peut en avoir. C’est exactement le genre de protestation que vous soulevez lorsque vous tentez d’expliquer à un quidam que la vitesse de la lumière est une barrière infranchissable pour notre forme d’organisation. Immédiatement, vous pouvez voir dans ses yeux le doute bonhomme s’installer, doute qui repose sur une croyance: si on ne parvient pas à franchir la vitesse de la lumière, c’est évidemment parce qu’on n’a pas inventé le moteur capable de nous y propulser. Ce n’est qu’une question de temps. Et bien non. Ce n’est pas une question de progrès. C’est tout bonnement impossible. Ce genre de limite posé à l’imaginaire humain n’est pas très bien pris. Comme si on remettait en cause la liberté fondamentale de l’être humain en énonçant des vérités intangibles de cette sorte. C’est agaçant. Je pense que poser une limite au savoir humain est du même ordre. En ce sens, Heisenberg est un des rares très grands esprits de notre histoire. Une rupture véritable dans l’univers de la pensée... Mais si l’agacement est votre tasse de thé, je peux en rajouter: je connais d’autres limites aux possibilités de la matière.
Quant à mon émission, je me suis rassuré lorsque j’ai entendu l’un des intervenants expliquer très sérieusement que l’impossibilité face à laquelle nous a amenés Heisenberg tenait uniquement à la nature même de la mesure, c’est à dire à la perturbation introduite dans la mesure par l’instrument lui-même. Et ça, désolé, on n’en sait rien. Et on est bien incapable de l’affirmer. Peut-être que c’est l’instrument... Ce qui est la version la plus simpliste.... Mais peut-être que c’est une propriété intrinsèque de la matière. On n’en sait absolument rien. Et on n’en saura probablement jamais rien. Cette émission portait sur les philosophes sceptiques. Il est notable de constater que les intervenants ne semblaient pas atteints, eux-mêmes, par un doute quelconque sur la capacité de l’Homme à connaître... Mais peu importe, au fond, de savoir si oui ou non Heisenberg a énoncé ou non un principe. Un véritable principe. Qui se vérifie ou se vérifiera quoi qu’on fasse ou sache. Ce qui compte, c’est qu’il a mis le doigt sur une problématique dont tous les scientifiques les plus performants ont toujours eu une conscience vague mais profonde: l’Homme ne peut pas tout savoir. C’est un concept absolument révolutionnaire aujourd’hui encore.
Au bout d’une demi-heure, je me suis rendu compte que les invités de l’émission étaient tous des littéraires. Alors vous allez me dire que je me suis raccroché à mes branches... Ces foutus littéraires n’y connaissent rien en sciences et c’est donc normal, pour moi, qu’ils paraissent à côté de la plaque... Et vous aurez raison... Sauf que, si vous me lisez, vous savez que je viens de mettre le doigt sur un problème que j’ai déjà soulevé: le manque de culture scientifique qui concerne, par exemple, un homme comme Camus, qui ne conclut à “l’absurde”, à mon sens, que parce qu’il manque cruellement du recul que pourrait lui donner une culture scientifique dans sa conception de l’univers. En gros, ce n’est pas parce qu’on ne comprend pas qu’il n’y a rien à comprendre.... C’est, pour le moins, un peu court.... Autrement dit : ce n’est pas parce qu’on ne trouve pas de sens à l’organisation de la matière qu’il n’y a pas de sens à l’organisation de la matière.. Mais c’est encore assez faible, comme vertige... Parce que, lorsqu’on jouit d’une éducation scientifique rigoureuse, ce dont on s’aperçoit, à terme, c’est que l’absence de sens n’est pas en soi un problème. Mieux!, que c’est la recherche de sens qui interdit de trouver un sens éventuel.... Parce que toute quête de sens est obligatoirement une réduction du champs du possible.... Pour moi, cette constatation repose sur la lecture du livre de W. Heisenberg. Je suppose qu’il existe d’autres chemins pour en arriver à ce point. Mais ce qui est essentiel dans les considérations philosophiques de Heisenberg, c’est qu’il existe des limites intangibles à notre quête de savoir, à la recherche de sens. En énonçant qu’on ne peut, mathématiquement, pas connaître à la fois la position et la vitesse d’une particule, Heisenberg pose un jalon, sème un caillou, qui nous dit une chose: on ne peut pas tout savoir. En d’autres termes: la science a ses propres limites et ne pourra pas percer tous les mystères de la matière, de la vie, de l’univers.... A partir de lui, on sait que c’est impossible.... La géométrie, me disait un maître d’école de mon enfance, c’est l’art de raisonner vrai sur des figures fausses... Et peu m’importe, en vérité, de savoir si Heisenberg a ou non découvert un vrai principe, démontrable ou non. Il a levé un coin du voile sur notre devenir: depuis lui, on sait qu’il existe, qu’il pourrait exister, des choses, des phénomènes, qu’on n’expliquera jamais. Il a fixé une borne à la connaissance. Un putain de pavé dans la mare de tous ceux qui croient que le progrès peut mener toujours plus loin. D’un point de vue littéraire ou bien psychologique, ce genre d’affirmation génère logiquement une protestation évidente: la première limite au savoir de l’Homme, c’est bien entendu l’Homme lui-même. Ce qu’il trouve dépend entièrement de ce qu’il cherche.... Mais aussi des moyens qu’il se donne pour le rechercher. En particulier de sa capacité à remettre en cause ses propres certitudes. C’est d’une logique imparable. Si j’admets que la connaissance pourrait avoir des limites, c’est qu’il m’est favorable d’admettre que la connaissance peut en avoir. C’est exactement le genre de protestation que vous soulevez lorsque vous tentez d’expliquer à un quidam que la vitesse de la lumière est une barrière infranchissable pour notre forme d’organisation. Immédiatement, vous pouvez voir dans ses yeux le doute bonhomme s’installer, doute qui repose sur une croyance: si on ne parvient pas à franchir la vitesse de la lumière, c’est évidemment parce qu’on n’a pas inventé le moteur capable de nous y propulser. Ce n’est qu’une question de temps. Et bien non. Ce n’est pas une question de progrès. C’est tout bonnement impossible. Ce genre de limite posé à l’imaginaire humain n’est pas très bien pris. Comme si on remettait en cause la liberté fondamentale de l’être humain en énonçant des vérités intangibles de cette sorte. C’est agaçant. Je pense que poser une limite au savoir humain est du même ordre. En ce sens, Heisenberg est un des rares très grands esprits de notre histoire. Une rupture véritable dans l’univers de la pensée... Mais si l’agacement est votre tasse de thé, je peux en rajouter: je connais d’autres limites aux possibilités de la matière.
Quant à mon émission, je me suis rassuré lorsque j’ai entendu l’un des intervenants expliquer très sérieusement que l’impossibilité face à laquelle nous a amenés Heisenberg tenait uniquement à la nature même de la mesure, c’est à dire à la perturbation introduite dans la mesure par l’instrument lui-même. Et ça, désolé, on n’en sait rien. Et on est bien incapable de l’affirmer. Peut-être que c’est l’instrument... Ce qui est la version la plus simpliste.... Mais peut-être que c’est une propriété intrinsèque de la matière. On n’en sait absolument rien. Et on n’en saura probablement jamais rien. Cette émission portait sur les philosophes sceptiques. Il est notable de constater que les intervenants ne semblaient pas atteints, eux-mêmes, par un doute quelconque sur la capacité de l’Homme à connaître... Mais peu importe, au fond, de savoir si oui ou non Heisenberg a énoncé ou non un principe. Un véritable principe. Qui se vérifie ou se vérifiera quoi qu’on fasse ou sache. Ce qui compte, c’est qu’il a mis le doigt sur une problématique dont tous les scientifiques les plus performants ont toujours eu une conscience vague mais profonde: l’Homme ne peut pas tout savoir. C’est un concept absolument révolutionnaire aujourd’hui encore.
mercredi 10 février 2010
L'argument du Boeing
L’un des arguments des créationistes, aujourd’hui dénommés “tenants du dessein intelligent”, est celui du “Boeing”... Voir à ce sujet “Pour en finir avec dieu”, de Richard Dawkins (ed Perrin/Tempus). Pour résumer: combien de chances pour qu’un vent soufflant sur une décharge puisse réunir en un point tous les éléments nécessaires ( qui s’y trouvent, en général!...) et puisse les assembler pour former un Boeing?.... Ne calculez pas.. C’est un sur des milliards de milliards.... Argument qui sous-entend, donc, que la machine humaine ne peut être le fruit d’un hasard, que pour en arriver à l’Homme, il faut une idée au départ.. Ce sont les “statistiques” qui nous l’enseignent. Et bien, je le crois, tout est là, effectivement... Et le problème est d’une complexité absolument effarante... A tel point que je ne sais pas par où commencer... Remarque qu’il convient de tempérer par le célèbre: “Tout est dans tout et réciproquement, le reste, c’est dans Victor Hugo!..”
Commençons par le fait que, pour ces gens, mais c’est également le cas de ceux qui s’évertuent à répondre logiquement à cet argument, tels Dawkins lui-même, pour ces gens, donc, l’organisation optimale des atomes contenus dans une décharge, c’est un Boeing... Admettez qu’on peut en douter. Personnellement, je préfère le foie gras... Mais le sous-entendu, c’est évidemment que l’organisation optimale des atomes qui peuplent la surface de la Terre est... l’Homme!... Et là!... Le moins qu’on puisse en dire, c’est que nous serions face à un anthropocentrisme évident. Nous savons aujourd’hui avec de bonnes chances de ne pas nous tromper, que l’Homme aurait pu ne pas apparaître, qu’étant apparu, il aurait pu disparaître (Voir: Avant Adam, de J. London), comme ce fut le cas de Neanderthal, et que, dans le cas où, aujourd’hui, la Terre ne serait plus peuplée d’humains, ce serait une autre espèce qui dominerait à sa surface. Mais, bien entendu, je viens de pisser dans un Stradivarius... Les créationistes ne “croient” pas en l’évolution. Ils “croient” que dieu aurait déposé l’Homme sur Terre dans sa forme définitive et à son image. Ils “croient” donc bel et bien que l’Homme est la forme suprême d’organisation des atomes dans l’univers. En résumé, ils placent la valeur de leur propre vie au-dessus de toute autre. Leur argumentation repose sur la complexité de la machine humaine. Une telle perfection ne peut pas être le fruit du hasard. Ce qui ramène, d’emblée, à la définition de la perfection. Ainsi, l’hypothèse même d’une intervention divine, puisqu’elle place l’être humain au sommet de la hiérarchie terrestre, est à la fois la question et la réponse. Dans cette logique, on perçoit clairement que le débat ne peut avoir lieu. Il n’y a pas de débat. Il ne pourrait y avoir que des preuves. Aux preuves scientifiques que nous pourrions leur asséner, à mon sens écrasantes, les créationistes répondent par le Boeing. Le hasard ne peut aboutir à une machine aussi parfaite qu’un Boeing. Mais parfaite pour qui? En quoi un Boeing est-il plus parfait que les falaises d’Etretat, par exemple? Ou qu’une fourmi? Car, il faut l’avoir présent à l’esprit, la fourmi, elle, les singes, pourraient être les fruits du hasard. L’évolution existe, pour ces gens, mais ne concerne pas l’Homme.
Cela me fait penser au cube de Mr Rubik. De toutes les possibilités de configuration de ce cube, une seule nous intéresse: celle où toutes les faces sont d’une seule couleur. Pourtant, chacune des configurations possibles est à la fois aussi probable que celle-là et a, d’un point de vue logique, autant d’intérêt. De plus, si je vous donne un cube aux faces brouillées et que je vous demande, après quelques tours de mélange, de me refaire exactement la figure que je vous ai montrée, je vous fous mon billet que vous en êtes incapable. Ce qui veut dire, en clair, que, si je vous donne une décharge, vous aurez autant de mal à faire avec ce que vous y trouvez un Boeing que de me refaire la décharge, dans l’ordre exact où elle était au départ... Il existe donc bien une finalité pré-envisagée dans le fait que l’on considère le Boeing comme ayant plus d’intérêt que la décharge. Et c’est évidemment le même problème que le précédent: la prééminence, dans l’esprit des créationistes, autant que dans celui des contradicteurs, d’une part, de l’Homme, d’une autre, de ce qui lui est utile. Les tenants du dessein intelligents se mordent la queue uniquement parce qu’ils considèrent l’Homme comme l’aboutissement absolu de l’évolution et qu’ils n’accordent aucune valeur à toute autre forme d’organisation des atomes, ce qui s’entrevoit lorsqu’elle est inerte, mais qu’ils considèrent également comme négligeable toute autre forme d’organisation vivante autre que l’Homme. Cette idée est depuis longtemps contredite par les anti-humanistes, depuis Montaigne au moins. Contredite également par tous ceux qui militent pour une reconnaissance de la vie au sens strict, y compris, donc, celle du règne animal non humain.
L’inculture semble donc bien être le fondement du créationisme. S’il est permis de douter de l’inculture des inspirateurs de cette “théorie”, il l’est moins pour ce qui concerne les adeptes. L’inculture et la certitude de leur absolue domination dans l’échelle des valeurs universelles. En ce sens l’humanisme, terme aujourd’hui employé à tous vents, mérite amplement critique. En quoi l’Homme serait-il supérieur au reste de l’univers? Mais leurs contradicteurs ne me semblent pas non plus exempts de reproches. Considérer l’hypothèse du Boeing au point d’y répondre me semble en être la marque. Inculture, certes, mais pas uniquement inculture. Car le raisonnement repose sur “des” considérations scientifiques. Ne serait-ce que le point de vue statistique de l'argumentaire... S’il n’y a que très peu de place pour le hasard, c’est bien que ce hasard, celui qui conduirait à la création de l’être humain, jouit d’une très faible probabilité... et les probabilités, c’est de la mathématique. Plus que d’inculture, donc, il s’agit d’une exploitation de la culture dans le sens recherché. Et, donc, d’un sens de l’à-priori... Cet à-priori, c’est évidemment que l’Homme est à part dans le processus de création.... Quelle probabilité avez-vous, lorsque vous prendrez votre automobile demain matin qu’il ait neigé et que, lors de votre parcours, vous rencontriez le bus qui va vous tuer? Zéro!... Pourtant, cela pourrait arriver. Et je vous fous mon billet que, si cela se produit, il y aura un tas de gens capables d’expliquer que cela ne pouvait se produire.. Et d’autres qui vous démontreront que cela était inéluctable.
La seule réponse que j’envisagerais à la question du Boeing serait: pourquoi un Boeing?
Tout à fait fortuitement, je tiens à faire remarquer ici que le correcteur d’orthographe de mon ordinateur, qui ignore le terme ”créationisme” (c’est assez heureux!...) , me propose, en remplacement, le mot : crétinisme.
Commençons par le fait que, pour ces gens, mais c’est également le cas de ceux qui s’évertuent à répondre logiquement à cet argument, tels Dawkins lui-même, pour ces gens, donc, l’organisation optimale des atomes contenus dans une décharge, c’est un Boeing... Admettez qu’on peut en douter. Personnellement, je préfère le foie gras... Mais le sous-entendu, c’est évidemment que l’organisation optimale des atomes qui peuplent la surface de la Terre est... l’Homme!... Et là!... Le moins qu’on puisse en dire, c’est que nous serions face à un anthropocentrisme évident. Nous savons aujourd’hui avec de bonnes chances de ne pas nous tromper, que l’Homme aurait pu ne pas apparaître, qu’étant apparu, il aurait pu disparaître (Voir: Avant Adam, de J. London), comme ce fut le cas de Neanderthal, et que, dans le cas où, aujourd’hui, la Terre ne serait plus peuplée d’humains, ce serait une autre espèce qui dominerait à sa surface. Mais, bien entendu, je viens de pisser dans un Stradivarius... Les créationistes ne “croient” pas en l’évolution. Ils “croient” que dieu aurait déposé l’Homme sur Terre dans sa forme définitive et à son image. Ils “croient” donc bel et bien que l’Homme est la forme suprême d’organisation des atomes dans l’univers. En résumé, ils placent la valeur de leur propre vie au-dessus de toute autre. Leur argumentation repose sur la complexité de la machine humaine. Une telle perfection ne peut pas être le fruit du hasard. Ce qui ramène, d’emblée, à la définition de la perfection. Ainsi, l’hypothèse même d’une intervention divine, puisqu’elle place l’être humain au sommet de la hiérarchie terrestre, est à la fois la question et la réponse. Dans cette logique, on perçoit clairement que le débat ne peut avoir lieu. Il n’y a pas de débat. Il ne pourrait y avoir que des preuves. Aux preuves scientifiques que nous pourrions leur asséner, à mon sens écrasantes, les créationistes répondent par le Boeing. Le hasard ne peut aboutir à une machine aussi parfaite qu’un Boeing. Mais parfaite pour qui? En quoi un Boeing est-il plus parfait que les falaises d’Etretat, par exemple? Ou qu’une fourmi? Car, il faut l’avoir présent à l’esprit, la fourmi, elle, les singes, pourraient être les fruits du hasard. L’évolution existe, pour ces gens, mais ne concerne pas l’Homme.
Cela me fait penser au cube de Mr Rubik. De toutes les possibilités de configuration de ce cube, une seule nous intéresse: celle où toutes les faces sont d’une seule couleur. Pourtant, chacune des configurations possibles est à la fois aussi probable que celle-là et a, d’un point de vue logique, autant d’intérêt. De plus, si je vous donne un cube aux faces brouillées et que je vous demande, après quelques tours de mélange, de me refaire exactement la figure que je vous ai montrée, je vous fous mon billet que vous en êtes incapable. Ce qui veut dire, en clair, que, si je vous donne une décharge, vous aurez autant de mal à faire avec ce que vous y trouvez un Boeing que de me refaire la décharge, dans l’ordre exact où elle était au départ... Il existe donc bien une finalité pré-envisagée dans le fait que l’on considère le Boeing comme ayant plus d’intérêt que la décharge. Et c’est évidemment le même problème que le précédent: la prééminence, dans l’esprit des créationistes, autant que dans celui des contradicteurs, d’une part, de l’Homme, d’une autre, de ce qui lui est utile. Les tenants du dessein intelligents se mordent la queue uniquement parce qu’ils considèrent l’Homme comme l’aboutissement absolu de l’évolution et qu’ils n’accordent aucune valeur à toute autre forme d’organisation des atomes, ce qui s’entrevoit lorsqu’elle est inerte, mais qu’ils considèrent également comme négligeable toute autre forme d’organisation vivante autre que l’Homme. Cette idée est depuis longtemps contredite par les anti-humanistes, depuis Montaigne au moins. Contredite également par tous ceux qui militent pour une reconnaissance de la vie au sens strict, y compris, donc, celle du règne animal non humain.
L’inculture semble donc bien être le fondement du créationisme. S’il est permis de douter de l’inculture des inspirateurs de cette “théorie”, il l’est moins pour ce qui concerne les adeptes. L’inculture et la certitude de leur absolue domination dans l’échelle des valeurs universelles. En ce sens l’humanisme, terme aujourd’hui employé à tous vents, mérite amplement critique. En quoi l’Homme serait-il supérieur au reste de l’univers? Mais leurs contradicteurs ne me semblent pas non plus exempts de reproches. Considérer l’hypothèse du Boeing au point d’y répondre me semble en être la marque. Inculture, certes, mais pas uniquement inculture. Car le raisonnement repose sur “des” considérations scientifiques. Ne serait-ce que le point de vue statistique de l'argumentaire... S’il n’y a que très peu de place pour le hasard, c’est bien que ce hasard, celui qui conduirait à la création de l’être humain, jouit d’une très faible probabilité... et les probabilités, c’est de la mathématique. Plus que d’inculture, donc, il s’agit d’une exploitation de la culture dans le sens recherché. Et, donc, d’un sens de l’à-priori... Cet à-priori, c’est évidemment que l’Homme est à part dans le processus de création.... Quelle probabilité avez-vous, lorsque vous prendrez votre automobile demain matin qu’il ait neigé et que, lors de votre parcours, vous rencontriez le bus qui va vous tuer? Zéro!... Pourtant, cela pourrait arriver. Et je vous fous mon billet que, si cela se produit, il y aura un tas de gens capables d’expliquer que cela ne pouvait se produire.. Et d’autres qui vous démontreront que cela était inéluctable.
La seule réponse que j’envisagerais à la question du Boeing serait: pourquoi un Boeing?
Tout à fait fortuitement, je tiens à faire remarquer ici que le correcteur d’orthographe de mon ordinateur, qui ignore le terme ”créationisme” (c’est assez heureux!...) , me propose, en remplacement, le mot : crétinisme.
lundi 25 janvier 2010
Peillon vient de nous pondre un nouveau livre: “Une religion pour la République : foi laïque de Ferdinand Buisson”. J’aime beaucoup Peillon. Pour son côté “philosophe” et cultivé. Je me suis souvent demandé ce que ce type avait bien pu penser pour en arriver à être élu... La position d’élu ne va guère avec la qualité de philosophe, serait-il engagé.... Et c’est justement le sujet de son livre. Un un mot: la foi dans la laïcité.
Mais un mot, présentement, ce n’est évidemment pas suffisant. La constatation de base, c’est que l’homme est un animal croyant, ou , si l’on préfère, spirituel. Ce qui aboutit au constat imparable du fait qu’on ne pourra jamais tuer dieu. Jetez-le par la fenêtre, vous le verrez revenir par la cheminée. Et pas forcément plus présentable. Jetez le dieu des chrétiens et vous verrez revenir le stalinisme, par exemple. Un débat aussi vieux que la vie sur terre. Et qui, jusqu’ici, n’a pas trouvé de conclusion. Qui, d’ailleurs, n’en trouvera probablement pas. Mais ce n’est pas faute d’avoir essayé. L’histoire de la pensée est remplie de gens qui ont tenté de proposer une alternative. Et, force est de le reconnaître, chaque fois que l’une des ces alternatives proposées a été prise au sérieux et qu’on a tenté de l’appliquer, le remède s’est avéré pire que le mal.... C’est le point où Peillon pose problème, si l’on veut être euphémiste, fait froid dans l’échine, si l’on est réaliste... Parce qu’il est un “politique”. Et que, c’est évident, chaque fois qu’un politique se mêle de nous indiquer la voie par où il vaudrait mieux penser, on sait, par expérience, hélas, que cette voie est sans issue mais, plus gravement, qu’elle mène au génocide. Peillon vient donc de démontrer, j’en suis fort contrarié, que son positionnement “entre deux chaises”, entre deux carrières, le conduit, comme beaucoup de ses prédécesseurs, à nous inciter à prendre un chemin malodorant : celui du dogmatisme républicain et laïque qui serait censé remplacer le dogmatisme religieux.
Je crains que seuls quelques terriens soient capables d’envisager le ciel vide et de ne surtout pas imaginer de remplir ce vide...
Tout à fait fortuitement, je viens de finir une pièce de théâtre sur ce sujet. J’ai situé l’action un soir de 1791, avec, comme protagonistes, Robespierre et Danton. Le propos est de démontrer que tous les révolutionnaires ont, un jour ou l’autre, dérapé, franchi le rubicon, pensé pouvoir remplacer l’aliénation que représente la croyance en un dieu par une autre, pensé qu’on peut créer une religion nouvelle, envisagé de libérer l’Homme en lui offrant une nouvelle prison. Robespierre n’est pas le seul exemple, loin de là. Mais il est une part de notre mythologie républicaine. En ce sens, son cas mérite l’étude. Je le trouverais néanmoins toujours beaucoup plus digne que d’autres, qui l’ont précédé, qui l’ont suivi. Parce qu’il fait partie des défricheurs, des découvreurs, et qu’il n’a pas servi d’intérêts autre que celui de sa propre conviction.. Ravageuse, comme d’autres... Tout se vaut-il?
J’ai mis mon texte en ligne ici : http://artz.pascal.free.fr/R%20et%20D.html
Merci de le lire......
Mais un mot, présentement, ce n’est évidemment pas suffisant. La constatation de base, c’est que l’homme est un animal croyant, ou , si l’on préfère, spirituel. Ce qui aboutit au constat imparable du fait qu’on ne pourra jamais tuer dieu. Jetez-le par la fenêtre, vous le verrez revenir par la cheminée. Et pas forcément plus présentable. Jetez le dieu des chrétiens et vous verrez revenir le stalinisme, par exemple. Un débat aussi vieux que la vie sur terre. Et qui, jusqu’ici, n’a pas trouvé de conclusion. Qui, d’ailleurs, n’en trouvera probablement pas. Mais ce n’est pas faute d’avoir essayé. L’histoire de la pensée est remplie de gens qui ont tenté de proposer une alternative. Et, force est de le reconnaître, chaque fois que l’une des ces alternatives proposées a été prise au sérieux et qu’on a tenté de l’appliquer, le remède s’est avéré pire que le mal.... C’est le point où Peillon pose problème, si l’on veut être euphémiste, fait froid dans l’échine, si l’on est réaliste... Parce qu’il est un “politique”. Et que, c’est évident, chaque fois qu’un politique se mêle de nous indiquer la voie par où il vaudrait mieux penser, on sait, par expérience, hélas, que cette voie est sans issue mais, plus gravement, qu’elle mène au génocide. Peillon vient donc de démontrer, j’en suis fort contrarié, que son positionnement “entre deux chaises”, entre deux carrières, le conduit, comme beaucoup de ses prédécesseurs, à nous inciter à prendre un chemin malodorant : celui du dogmatisme républicain et laïque qui serait censé remplacer le dogmatisme religieux.
Je crains que seuls quelques terriens soient capables d’envisager le ciel vide et de ne surtout pas imaginer de remplir ce vide...
Tout à fait fortuitement, je viens de finir une pièce de théâtre sur ce sujet. J’ai situé l’action un soir de 1791, avec, comme protagonistes, Robespierre et Danton. Le propos est de démontrer que tous les révolutionnaires ont, un jour ou l’autre, dérapé, franchi le rubicon, pensé pouvoir remplacer l’aliénation que représente la croyance en un dieu par une autre, pensé qu’on peut créer une religion nouvelle, envisagé de libérer l’Homme en lui offrant une nouvelle prison. Robespierre n’est pas le seul exemple, loin de là. Mais il est une part de notre mythologie républicaine. En ce sens, son cas mérite l’étude. Je le trouverais néanmoins toujours beaucoup plus digne que d’autres, qui l’ont précédé, qui l’ont suivi. Parce qu’il fait partie des défricheurs, des découvreurs, et qu’il n’a pas servi d’intérêts autre que celui de sa propre conviction.. Ravageuse, comme d’autres... Tout se vaut-il?
J’ai mis mon texte en ligne ici : http://artz.pascal.free.fr/R%20et%20D.html
Merci de le lire......
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