Rien n’y fait. J’ai beau me sermonner, me contraindre à l’étude, tenter de me rendre aux arguments adverses, de les entendre, ad minima, je suis navré, rien n’y fait, je ne peux décidément pas m’intéresser aux philosophes qui font référence au concept divin. Je n’ai pas même parlé de ceux qui croient. Je dis bien référence. Je suis désolé, non, vraiment, dieu n’existe pas. Dieu n’a jamais existé. Le concept de mort de dieu est déjà, pour moi, limite. Affirmer cela, c’est exclure de l’étude à peu près tous les philosophes aujourd’hui appréciés, c’est créer une énorme parenthèse dans l’histoire de la pensée qui commencerait à Platon et se terminerait aux alentours de Nietzsche, Freud et Husserl. Comparaison n’est pas raison, c’est entendu. Je vais néanmoins vous livrer une explication comparative. Avant Copernic et Galilée, la Terre était considérée comme l’astre principal de l’univers autour duquel tout s’organisait. Cette conception est tombée d’un coup. Il y a un avant et un après. La conception terro-centriste de l’univers fait aujourd’hui sourire et, si nous considérons la pensée qui a précédé, ce n’est qu’à titre anecdotique, comme une curiosité. La pensée actuelle sur la situation spatiale de la Terre dans l’univers ne prend à aucun moment en compte l’idée qui l’a précédée. L’antique pensée est risible, ridicule, totalement obsolète. Si dieu n’a jamais existé, je le crains, nous ne sommes pas encore entrés dans l’aire où cette pensée est ridicule. Nous sommes, objectivement, dans un entre-deux, cette période où certains des contradicteurs, dans le sillage de Galilée, sont capables de se renier devant les Hommes pour préserver leur intégrité. Pourtant, l’aventure intellectuelle consistant à considérer que l’esprit humain s’est égaré pendant de nombreux siècles est possible. Elle suppose de jeter aux orties un ensemble de penseurs assez impressionnants, peut-être trop impressionnants, Kant, Rousseau, Spinoza, Platon, Hume, Pascal, la liste en est infinie.... Tous ces personnages ont raisonné le concept de dieu. Pas forcément pour l’accréditer. Du moins lui ont-ils tous donné corps. Jetons-les, juste un instant, et envisageons le paysage philosophique une fois leur disparition acceptée. Je suis certain que, pour beaucoup, nous sommes dans un désert. Rien!.. Il ne resterait rien!.... C’est une vision absolument fausse. Qui serait capable de m’affirmer que le marquis de Sade était croyant? Ou bien Robespierre? Restif de la Bretonne? Villon? Casanova? Quelqu’un peut-il m’affirmer que Michel Ange était croyant? Vous avez regardé ses peintures? Le problème, c’est que l’église a longtemps été le seul mécène. Qu’auriez-vous fait? Crever de faim ou peindre des anges sexués? La plupart d’entre nous aurait, j’en suis convaincu, peint des anges sans sexe. Jetez un oeil aux peintures de Michel Ange. Ce type ne croit pas. Transposé à notre époque, la question serait: croyez-vous vraiment que l’intégralité de l’art contemporain peut se résumer à ce qu’en expose Mr Pinault dans son nouveau musée de Venise?
Le problème que nous pose la religion, c’est qu’elle est devenue si incontournable, naturelle, que vous ne pourrez jamais accéder aux canaux de la renommée si vous la niez. Renommée, ceci m’amène, personnellement, à Brassens, qui l’a si bien dénoncée. Brassens, fervent croyant et, par là, pour moi, forcément insignifiant. Le piège, avec les croyants, c’est que le débat n’est pas favorable à l’hypothèse de la non-existence. En débattant, vous accréditez. Dieu n’a jamais existé, tout le monde, maintenant, en est à peu près d’accord. Son refuge est le fait que, puisque nous acceptons d’en discourir, c’est bien la preuve qu’il existe, au moins dans l’esprit des Hommes. Dieu est donc obligatoirement un sujet pour qui veut entretenir commerce avec les Hommes. Fondamentalement, donc, la négation de dieu comporte une certaine exclusion de la société des Hommes. Du fond de ma cave, j’en accepte l’augure: ne parlons plus de dieu. Ni de plus aucune de ses déclinaisons, serait-elle estampillée du sceau philosophique. Avec l’eau du bain divin, jetons le bébé flétri de la pensée divine. Cette attitude, choisie, dont je suis le seul responsable, me condamne à l’isolement. Parfait!... Si je ne dois être qu’un caillou blanc sur le chemin de la lumière, je serai ce caillou. Je l’accepte. Je crois que c’est plutôt la majorité du genre humain qui ne l’acceptera jamais, au nom de valeurs sur quoi il refuse définitivement de s’interroger et qui, dans quelques siècles, seront immanquablement aussi ridicules que l’idée selon laquelle la Terre pourrait être plate.... Il nous appartient, parce que nous sommes vivants dans cet entre-deux plus haut décrit, de prendre conscience du ridicule de l’idée même de dieu et de marquer aussi catégoriquement que nous le faisons pour les sciences avec Galilée, par exemple, ou bien Newton, le moment où l’idée de dieu a commencé de sombrer dans l’obsolescence. Il nous appartient aussi d’inventer une philosophie faisant l’économie du détour par le concept de dieu. Pour cela, nous disposons d’outils au moins aussi efficaces que pour l’autre, des philosophes pré-platoniciens, en passant par Nietzsche, Palante, de Gaultier, en nous appuyant sur une pléiade d’auteurs athées voire anticléricaux, jusqu’à Onfray. En oubliant dieu et la religion, en les faisant passer de l‘actualité à l’histoire de la pensée, en les évacuant définitivement. La tâche ne semble pas si ardue.
mardi 15 septembre 2009
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Bravo !
RépondreSupprimerPasser d'une hypothèse physique désuète sur la galette terrienne
à une conclusion métaphysique sur le vide divin
n'est pas à la portée de tout premier venu
même doté dans son génome de l'ADN de la philosophie
Chromosome absent chez moi, hélas !
Tant d'énergie déployée à combattre une idée de "Dieu"
semble alimentée par..."Satan", lui-même plausible
qu'en raison de son contraire !
Mais il s'agit ici d'un simple humour épistolaire
pour trouver notre propre Noosphère
Vous débattez... en accréditant donc !
Merci quand même.
Jaime007